24/05/2016
Bayer, le triomphe de la chimie d'Outre Rhin !
La Commission européenne, l'industrie américaine et l'industrie allemande... Qui fait quoi ?
Par dessus la France, l'industrie allemande cherche des alliés en Amérique... c'est le meilleur indice du décalage, qui va croissant, entre l'Allemagne et la France !
L'Europe dans le rôle fédérateur est ici en porte à faux ! Autoriser ou interdire un produit, comme le Round Up, c'est fatalement décider de la vie ou de la mort de Monsanto, et donc de la valeur financière de cette société...et donc de faciliter les transactions allemandes pour le rachat !
A côté de la santé humaine, l'agrochimie est une branche pharmaceutique, fortement exportatrice...
ici encore l'effet de ciseau sur les résultats des commerces extérieurs des deux pays aggrave le "gap" français.
L'Europe, ici, accentue encore plus les distorsions entre économies concurrentes !
Bayer est prêt à réaliser la plus grosse acquisition allemande de l'histoire
Les Echos du 24 mai 2016
Bayer est prêt à réaliser la plus grosse acquisition allemande de l'histoire
Le groupe allemand met 62 milliards de dollars sur la table pour convaincre l'américain Monsanto. La combinaison des deux géants de l'agrochimie peine néanmoins à séduire les marchés.
Bayer a abattu ses cartes. Le géant allemand de la pharmacie et de l'agrochimie a dévoilé lundi une offre d'un montant de 62 milliards de dollars, ou 55 milliards d'euro, sur l'américain Monsanto, leader mondial dans les semences agricoles. Outre son attrait stratégique, l'opération va « créer bien plus de valeur » pour les parties intéressées, à commencer par les actionnaires, a martelé Werner Baumann, le nouveau patron de Bayer depuis moins d'un mois. Mais pour convaincre, l'ancien directeur financier du groupe devra braver les critiques liées à la mauvaise réputation de la cible, surtout en Europe.
Werner Baumann promettait il y a peu qu'il y aurait une « évolution, non une révolution » pour Bayer après qu'il a pris la succession de l'ancien patron du groupe, Marjin Dekkers. Mais il pourrait bien être démenti. Certes, une reprise de Monsanto ne remettrait pas à plat la stratégie de l'inventeur de l'aspirine. Mais elle conduirait à placer sa division santé - humaine et animale - au même niveau que l'agrochimie, qui n'occupe à ce jour qu'un tiers des ventes. Un virage historique.
L'offre de Bayer se fait aussi au prix fort. Pour mettre la main sur Monsanto, le prix par action proposé s'élève à 122 dollars, soit un montant supérieur de 37 % à celui du titre, avant que les premières marques d'intérêt de l'Allemand ne soient connues. L'analyste Jeremy Redenius, de Bernstein Research, estime que le prix offert est encore insuffisant. Selon lui, les Américains n'accepteront pas d'offre sous les 135 dollars par action. Mais Bayer ne devra pas non plus effrayer les marchés. Chez Union Investment, en Allemagne, on jugeait hier la reprise de Monsanto cohérente mais « pas à réaliser à n'importe quel prix ». Lundi soir, Monsanto n'avait pas encore donné de réponse à l'offre. Ce qui laissait encore cours à toutes les spéculations quant à son devenir. Le nom de l'allemand BASF, un autre géant de la chimie, est aussi évoqué.
Si Bayer parvenait à ses fins, ce serait la plus grande acquisition jamais réalisée par une entreprise allemande. L'ensemble placerait Bayer-Monsanto en tête des cinq grands fabricants de semences et de pesticides, après que les concurrents Dow Chemical et DuPont aient uni leur destin.
Inquiétude de la Bourse
L'Allemand veut réaliser la transaction entièrement en cash, en finançant un quart via une augmentation de capital, le reste étant de la dette. L'endettement du groupe devrait du coup augmenter de près d'un tiers, ce qui inquiète beaucoup la Bourse. Le deal dans l'agrochimie devrait par ailleurs mobiliser l'attention du management au détriment des activités du groupe dans la santé, un domaine où un renforcement serait davantage accepté des investisseurs. Dans ce contexte, l'action Bayer a perdu 4,83 % hier, après avoir cédé déjà 9 % ces derniers jours.
Werner Baumann aura donc beaucoup d'efforts à faire pour convaincre des investisseurs plutôt sceptiques. Outre-Rhin, le patron cinquantenaire ne se lasse pas de présenter l'offre actuelle comme « très attractive », à un moment où le secteur de l'agrochimie se consolide à cause de la baisse des cours des matières premières agricoles. Avant tout, le patron allemand défend un projet « capable de favoriser l'innovation et les technologies pour permettre aux agriculteurs d'avoir de plus importantes récoltes et répondre aux défis d'une population sans cesse grandissante ».
Le groupe de Leverkusen est par ailleurs conscient qu'il subira les conséquences de la mauvaise image de Monsanto (lire ci-dessous). Pour cela, Bayer est prêt à engager la discussion avec les ONG qui critiquent beaucoup la société. Faudrait-il aussi gommer le nom de Monsanto en cas d'acquisition ? « Trop tôt pour spéculer dessus », a affirmé Werner Baumann lors d'une conférence téléphonique.
Du Roundup dans l’urine parlementaire
LE MONDE du 13 mai 2016
Montrer que l’imprégnation de la population au glyphosate ne s’arrête pas aux portes des lieux de pouvoir et peser sur les dernières discussions qui pourraient aboutir à sa réautorisation en Europe. C’était l’objectif assumé d’une opération de communication lancée voilà plusieurs semaines par des eurodéputés belges et consistant à mesurer la présence de l’herbicide, molécule active du célèbre Roundup de Monsanto, dans l’urine d’un échantillon de leurs pairs du Parlement européen. Les résultats, rendus publics jeudi 12 mai, sont éloquents.
Sur les 48 parlementaires s’étant pliés à l’exercice – de treize nationalités et de toutes les couleurs politiques – tous présentaient une teneur détectable de glyphosate dans leur urine. A des taux souvent élevés, la moyenne étant de 1,7 microgramme par litre (µg/l), soit dix-sept fois le seuil légal toléré dans l’eau potable. Les taux de contamination les plus élevés sont plus de trente-cinq fois supérieurs à ce seuil.
La cinquantaine d’eurodéputés cobayes n’est nullement représentative de l’ensemble de la population européenne. Les Français sont très présents, avec sept députés testés, dont la teneur moyenne de glyphosate est d’environ vingt fois le seuil limite toléré dans l’eau potable.
Les Belges sont également très surreprésentés, avec vingt volontaires. « Nous nous sommes particulièrement mobilisés car la Belgique est l’un des pays qui se montre le plus favorable à la réautorisation du glyphosate en Europe, annonce le porte-parole de Marc Tarabella, l’un des eurodéputés à l’origine de l’initiative. Les résultats de ces analyses ne sont pas représentatifs de la population générale, mais ils sont parfaitement cohérents avec les résultats d’autres enquêtes, en particulier celle conduite en Allemagne voilà quelques mois, qui mettait en évidence des taux de contamination semblable. »
Lire : Les trois quarts des Allemands seraient exposés au glyphosate
La réautorisation du glyphosate en question
Il est cependant difficile d’évaluer les effets sanitaires d’une telle exposition. Réagissant à l’étude allemande, l’Institut fédéral d’évaluation des risques allemand (Bundesinstitut für Risikobewertung) avait estimé que les taux détectés étaient sans danger.
La toxicité du glyphosate – pesticide le plus utilisé dans le monde – est cependant au cœur d’une intense polémique scientifique. En mars 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) l’a classé « cancérogène probable » pour l’homme, tandis que quelques mois plus tard, les experts européens jugeaient « improbable » son potentiel cancérogène, lui donnant un blanc-seing pour sa réhomologation sur le Vieux Continent. Car à la fin de juin l’autorisation du glyphosate arrive à expiration en Europe.
Lire : Pesticides : Bruxelles va proposer une réautorisation du Roundup pour dix ans
L’analyse de l’urine europarlementaire aura-t-elle un effet sur la décision probable de l’Europe ? Rien n’est moins sûr. Le Parlement de Strasbourg s’est déjà mobilisé sur le sujet et a voté, le 13 avril, une résolution non contraignante demandant des restrictions d’usage de cette substance et la limitation de sa réautorisation à sept ans.
La Commission européenne conduit les dernières discussions avec les Etats membres, qui doivent voter, au cours d’un comité prévu pour les 18 et 19 mai, la remise en selle du produit en Europe. La dernière version de travail fait état d’une réautorisation de neuf ans, sans restrictions d’usage.
Pour convaincre, les eurodéputés belges devraient plutôt tenter de mettre la main sur des échantillons d’urine prélevés sur les ministres et les chefs d’Etats de l’Union. L’expérience a déjà été proposée par des eurodéputés écologistes à Jean-Claude Juncker, mais le chef de l’exécutif européen n’y a pas donné suite…
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/planete/article/2016/05/13/du-roundup-dans-l-urine-parlementaire_4919434_3244.html#5YrIBQ0LSdgaHL2A.99
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