19/01/2015
Bédune ? Camping "paradis" ?
Un mobil-home avec terrain, jusqu'à 58.000 euros...
La propriété de vacances "à bas prix" attire en Bretagne les "gogos" des villes, habilement rabattus par des commerciaux au verbe charmeur...
Résultat après quelques années de procédure : banqueroute, abus de biens sociaux et escroquerie pour le propriétaire du terrain, 725.000 euros de dommages et intérêts pour les 38 clients lésés !
Le passif de la société (1.909.000 euros) sera difficilement payé par la vente aux enchères du camp (396.000 euros)...
Les "campeurs" présumés seront donc les "dindons" de ce camping "Paradis"....
Affaires économiques, duo de choc au parquet de Vannes
Télégramme du 19 janvier 2015
À Magali Pauthier, les affaires commerciales et financières ; à Matthieu-Jean Thomas, les infractions au droit du travail, de l'environnement ou du transport : tout en se répartissant les tâches, les deux vice-procureurs du parquet de Vannes agissent en étroite collaboration.
Mathieu Pélicart
Depuis deux ans et l'arrivée d'un cinquième magistrat au parquet, le tribunal de Vannes a pu constituer un véritable pôle économique et commercial autour des vice-procureurs Matthieu-Jean Thomas et Magali Pauthier.
Avec des résultats visibles et des entreprises condamnées jusqu'en correctionnelle.
En juillet dernier, l'ancien propriétaire et gestionnaire du camping de Bédume (Ambon) condamné pour banqueroute, abus de biens sociaux et escroquerie à trois ans de prison, dont 18 mois avec sursis, et à payer plus 725.000 € de dommages et intérêts à 38 clients.
En novembre 2013, deux entreprises agroalimentaires morbihannaises condamnées pour tromperie à payer chacune 25.000 € d'amende, dont 12.000 € avec sursis, pour ne pas avoir appliqué la loi européenne sur l'étiquetage des produits à base de viande séparée mécaniquement.
Dossiers longs et complexes Deux affaires « emblématiques » et si complexes sur le papier (compte tenu du nombre de victimes pour la première et de l'évolution de la réglementation pour la seconde) qu'elles auraient été, dans un passé pas si lointain, au mieux renvoyées aux calendes grecques ou vers une juridiction spécialisée.
C'était sans compter sur l'arrivée, il y a deux ans, au parquet de Vannes, d'un nouveau magistrat : Matthieu-Jean Thomas. Et sur la volonté du procureur de la République, Thierry Phelippeau, de profiter de sa nomination sur ce poste, resté longtemps non pourvu, et de son expérience acquise précédemment à Rennes (vice-procureur, en charge des affaires économiques et commerciales), pour créer un véritable pôle dédié.
Matthieu-Jean Thomas travaille en étroite collaboration avec Magali Pauthier, l'autre vice-procureur, en poste depuis six ans, dont il a récupéré une partie des attributions spécifiques. À lui, dès lors, les infractions au droit du travail, de l'environnement, du transport, de la consommation ou de l'urbanisme. Sa collègue pouvant désormais se concentrer sur les affaires fiscales et douanières, commerciales et financières (banqueroutes, abus de bien sociaux, escroqueries).
De quoi se libérer un peu de temps pour éplucher des dossiers qui en prennent beaucoup, mais qui n'exonèrent pas les deux magistrats de leurs attributions générales (permanences pénales, audiences correctionnelles et de police).
« La justice pénale, ce n'est pas que les voleurs et les violeurs, c'est aussi le droit de tous les jours et des affaires qui touchent au quotidien de nos concitoyens », souligne Matthieu-Jean Thomas.
Traitement accéléré
En plus de moyens humains supplémentaires, ce nouveau pôle économique et commercial s'appuie sur la loi Perben 2 de 2004, qui a étendu la notion de personne morale à toutes les infractions, pour « changer les habitudes ». « Jusqu'alors, on poursuivait un salarié ou un dirigeant, et pas l'entreprise et son responsable en tant que personnalité morale », explique Magali Pauthier.
« Responsabiliser l'entreprise d'un côté, la protéger de l'abus de ses actionnaires de l'autre », c'est le message que fait désormais passer le binôme auprès des services d'enquête (police, gendarmerie) et des services de l'état chargés du contrôle des sociétés. « Il a fallu se faire connaître, montrer qu'on privilégiait désormais un traitement actif de ces affaires, même si elles sont souvent complexes. Nous n'avons pas la science infuse, donc on multiplie les échanges directs avec les services verbalisateurs, qui sont les plus à même de nous éclairer sur des réglementations en constante évolution ».
De nouvelles méthodes qui produisent déjà leur effet : à la Direction départementale de la protection des populations (DDPP), on note une accélération notable dans le traitement des procès-verbaux transmis au parquet en 2014 : 96 jours en moyenne pour une transaction (amende qui vaut extinction des poursuites) et 260 jours quand le dossier est renvoyé devant le tribunal, contre 560 jours auparavant. En complément Services de l'État : « Nos rapports sont plus fluides »
En matière d'affaires économiques et commerciales, les dossiers transmis au parquet émanent le plus souvent des services de l'État chargés du contrôle des entreprises : Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal), Direction départementale de la protection des populations (DDPP), Office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema), Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). « Plus cohérent » À la DDPP du Morbihan, l'ex-Répression des fraudes, le directeur adjoint Jean-Pierre Nello note « une nette accélération dans le traitement des dossiers en 2014 ». Il y voit « l'effet de l'évolution des modalités de gestion judiciaire », avec notamment l'extension du champ des transactions (amendes valant extinction des poursuites) au code rural et bientôt au code de la consommation (Loi Hamon). Mais il souligne aussi « une nouvelle fluidité de fonctionnement avec le parquet de Vannes » : « Les magistrats font appel à nous en amont sur les dossiers techniques, regroupent les affaires et nous convoquent comme témoin aux audiences. C'est plus cohérent et ça a plus d'impact auprès des justiciables ».
Cochons, ophtalmologie et produits bretons
Les affaires économiques et commerciales touchent à notre quotidien. Exemples avec quelques affaires jugées ces derniers mois à Vannes. Truies mal loties En décembre dernier, six éleveurs de porcs écopent d'amendes de 350 à 1.200 € pour non-respect de la directive européenne sur le bien-être des truies gestantes. Ils n'avaient pas mis aux normes leurs équipements, qui doivent désormais permettre aux truies de rester libres de leurs mouvements pendant la gestation. Ophtalmo à double foyer En février 2014, un ancien médecin ophtalmologiste est condamné à six mois de prison avec sursis et à une amende de 10.000 €. Il avait multiplié les déclarations d'actes médicaux, en les imputant notamment à la collaboratrice qui travaillait dans son cabinet. Des actes entraînant des paiements d'honoraires, dont une partie était reversée au cabinet qu'il dirigeait. Coopération sino-bretonne En juin dernier, le gérant d'une société morbihannaise, spécialisée dans la commercialisation de produits bretons non-alimentaires, est condamné à 10.000 € d'amende, dont 6.000 avec sursis, pour pratique commerciale trompeuse. Ses drapeaux, vêtements, vaisselle, commercialisés à 85 % en grande et moyenne surface et dans des boutiques spécialisées, étaient fabriqués en Asie.
© Le Télégramme - Plus d’information sur http://www.letelegramme.fr/morbihan/vannes/affaires-economiques-duo-de-choc-au-parquet-19-01-2015-10497226.php
Bédume, le camping mis aux enchères
Télégramme du 30 septembre 2014
Grabriel Simon
Le camping de Bédume sera vendu aux enchères avec une mise à prix de 396.000 EUR.
La décision a été prise par le tribunal de commerce de Vannes le 10 septembre dernier. C'est l'épilogue qui était attendu dans cette affaire par les résidants, particulièrement ceux qui ont acheté leur parcelle, et aussi par la mairie d'Ambon, qui espèrent une ouverture du terrain pour l'été prochain.
Ce serait aussi une étape importante vers le classement du volet juridico-commercial de ce dossier après celui du volet pénal suite à la condamnation, le 18 juillet dernier, du propriétaire, Didier Castan, à trois ans d'emprisonnement, dont 18 mois avec sursis, plus le versement de diverses sommes, particulièrement 700.000 EUR aux 38 parties civiles.
Condamnation devenue définitive, M. Castan n'ayant pas fait appel.
Des acquéreurs
Cette demande devant le tribunal de commerce pour la mise en vente était présentée à la requête du liquidateur, Me Bodelet. Ce dernier a pour mission de purger autant que possible le passif de la société s'élevant à 1.909.119 EUR et de rembourser les créanciers. Le tribunal a estimé, qu'il y a « urgence à vendre l'ensemble immobilier du fait des intérêts en jeu, notamment des risques importants de dégradation des biens et de la perte éventuelle de la valeur de cet actif ».
D'autant que le liquidateur est lui-même « constamment sollicité » par des acquéreurs potentiels ainsi que par les créanciers qui désirent rentrer aux plus vite dans leurs frais.
Une première vente en 2012
La vente portera sur l'ensemble du camping : le terrain d'une superficie totale de 40.656 m², les trois blocs sanitaires, le bâtiment d'accueil, le minigolf et la piscine. La mise à prix correspond à celle d'une précédente vente, car, en fait, le camping avait déjà fait l'objet, en mars 2012, d'une cession aux enchères avant que la mise en règlement judiciaire soit prononcée. Cela suite à une procédure de saisie immobilière demandée par le Crédit maritime Atlantique.
Un adjudicataire, Yann Gachet, avait déposé une offre pour 360.000 EUR et dix jours plus tard un autre acquéreur, la SARL Jacmar, s'était manifesté en renchérissant d'un dixième, à 396.000 EUR.
Mais, compte tenu de la mise en redressement judiciaire de la Sas du Bédume survenue dans l'intervalle, la mesure de saisie immobilière avait été suspendue et en conséquence la vente.
C'est cette procédure sur la base de la dernière surenchère qui est donc reprise à la demande du liquidateur, et malgré l'opposition de Didier Castan qui estime que le fonds de commerce devrait également faire partie du lot. Un argument rejeté par le tribunal pour lequel cette vente du fonds de commerce « obéit à des règles distinctes ».
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Camping de Bédume, quatre ans de prison requis
Télégramme du 11 juillet 2014
Loïc Berthy
À un an près, le parquet a requis la peine maximum à l'encontre du propriétaire et gestionnaire du camping de Bédume, à Ambon. L'homme est soupçonné d'avoir floué une quarantaine de clients. Le jugement sera rendu le 18 juillet.
Quatre ans de prison, pour un maximum de cinq encourus, le parquet n'a pas été tendre envers l'homme qui a comparu pendant deux jours devant le tribunal correctionnel de Vannes.
En réaction, l'avocat de la défense, maître Liger, a fustigé un réquisitoire « en dehors de toute proportion par rapport à ce qui se pratique dans ce genre d'affaire ». Le prévenu, dont l'expert a dit qu'il avait des facultés intellectuelles supérieures à la moyenne, diplômé de Sciences-Po Paris, a déjà fait un an de détention. Un homme qui n'a rien lâché durant les débats. « Vous pouvez l'interroger pendant une semaine, ça ne changera rien. Il ne répondra pas à vos questions », a déploré la substitut du procureur, Magali Pauthier.
Un à un, elle est revenue sur les chefs d'accusation qui pèsent sur le prévenu. La fraude fiscale : « On peut commettre des erreurs mais il ne s'est plié à aucun contrôle ».
Les abus de biens sociaux : 5,7 MEUR de passif pour la société Cledelle, 500.000 MEUR pour la Résidence Les pins, 1,9 MEUR pour la SAS Bédume, propriétaire du camping d'Ambon, autant pour la Foncière du Bédume, chargée de la location des emplacements et de la vente de mobile-homes.
« Toutes ces sommes ont forcément été détournées. Il ponctionnait quotidiennement dans les fonds de ses sociétés », a asséné le parquet.
Faillite personnelle
Les escroqueries. Au total, 760.000 EUR ont été encaissés sans que des clients n'obtiennent un mobile-home. Les transactions étaient opérées dans des salons, sans possibilité de se rétracter. « C'était une stratégie pour engranger des fonds. Les chèques étaient encaissés mais les commandes pas toujours faites ». En réponse, la défense a réitéré sa demande de supplément d'information, dénonçant l'absence d'expertises comptable et fiscale durant l'instruction, ainsi que l'absence totale de confrontations avec les parties civiles et le couple de commerciaux qui oeuvrait sur les salons.
« De toute ma carrière, je n'ai jamais vu un dossier aussi peu en état d'être jugé », a critiqué maître Liger.
Il a plaidé la relaxe pour les faits de banqueroute et d'escroquerie « parce qu'il n'a pas été démontré que mon client se serait livré à des manoeuvres frauduleuses ». L'avocat n'a reconnu des difficultés que dans une poignée de transactions. « Si mon client n'avait pas été incarcéré, il n'y aurait pas eu de liquidation judiciaire et il aurait pu les rembourser ». Quant aux abus de biens sociaux, le conseil a reconnu que le prévenu a « utilisé les comptes de ses sociétés à des fins personnelles », mais en a minimisé le caractère délictueux.
Le parquet a demandé le maintien en détention du prévenu, sa faillite personnelle pour une durée de 15 ans, ainsi que la confiscation de ses biens immobiliers à Montpellier, d'une valeur de 850.000 EUR, afin de dédommager les victimes et le fisc.
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Camping de Bédume, 40 plaignants face au prévenu
Télégramme du 10 juillet 2014
Loïc Berthy
C'est un procès hors-norme, ne serait-ce qu'en raison des 40 parties civiles présentes à l'audience, qui s'est ouvert, hier, à Vannes. Le prévenu, propriétaire et gestionnaire de campings et vendeurs de mobile-homes, est poursuivi pour escroquerie, banqueroute et abus de biens sociaux.
40 personnes et couples assistent, depuis hier, au tribunal correctionnel de Vannes, au procès de l'homme soupçonné de les avoir abusés. Cet homme de 58 ans est en détention provisoire depuis un an. Le début de l'audience a été marqué par un incident, l'assistance se faisant bruyamment entendre quand l'avocat de la défense a plaidé la nullité de la procédure pour vice de forme. Le président du tribunal a fermement rappelé ces victimes à l'ordre et intimé le silence. Elles viennent de Nantes, de Paris, de Lyon, de Grenoble et même de Belgique. Elles ont acheté des emplacements sur le camping de Bédume à Ambon pour des durées de 5, 10, 15 voire 30 ans. Et les mobile-homes à installer sur ces terrains.
Un trou de 1,5 million d'euros
Mais le camping a été placé en liquidation judiciaire en juin 2013. Nombre de plaignants ne peuvent donc plus profiter de la parcelle qu'elles ont payée. Pour certaines d'entre elles, c'est plus grave. Elles ont payé plusieurs dizaines de milliers d'euros ? jusqu'à 58.000 € - pour un mobile-home qui ne leur a jamais été livré. À l'audience, l'avocat du liquidateur judiciaire a fait l'inventaire des deux sociétés propriétaire et gestionnaire du camping. Au moment de la liquidation, elles étaient déficitaires toutes les deux, présentant un passif global de 1,5 million d'euros. Ce trou béant correspondrait à l'argent détourné qui a servi à provisionner d'autres sociétés en difficulté, ou bien qui a été utilisé par le prévenu à des fins personnelles. L'avocat du liquidateur a énuméré la liste des petits plaisirs que le prévenu s'est offert en puisant dans le compte de ses sociétés : quinze voyages au Maroc, une dizaine en Ukraine, d'autres en Lettonie, en Espagne, aux Pays-Bas ainsi que des séjours aux sports d'hiver.
Dommages et intérêts
Curieusement, le chef d'entreprise n'avait pas de compte bancaire en propre. « Ni compte ni voiture ni vraiment d'adresse à votre nom. C'est un peu atypique pour un chef d'entreprise, non ? », s'étonne le président du tribunal correctionnel. C'est le seul point sur lequel le prévenu a bien voulu s'entendre avec le magistrat. Les yeux rivés sur ses notes, il a tout le temps répondu point par point à ses questions, sur un ton combatif, n'hésitant pas parfois à l'interrompre pour prendre la parole. Sans toujours apporter les réponses attendues, ni convaincre sur sa probité. En fin d'audience, la dizaine d'avocats des parties civiles a fait des demandes de dommages et intérêts qui portent sur plusieurs centaines de milliers d'euros. L'administration fiscale, elle, réclame 70.000 €. L'audience se poursuit aujourd'hui par les réquisitions du procureur et la plaidoirie de la défense, puis le délibéré, à moins que le tribunal ne renvoie sa décision.
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