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29/10/2011

De grands changements dans le secteur santé ?

L'informatique apporte des gains énormes de productivité chez les professionnels de la santé ! Pour qui ?

Le "dossier médical personnel", rebaptisé "partagé" après un premier échec, devient aujourd'hui réalité en France. Construit au départ sur un schéma autoritaire et administratif, il est devenu un sous-produit de l'informatisation des actes hospitaliers et des ordonnances des libéraux de la médecine de ville. La coopération de tous les acteurs de la chaîne informatique nécessite une harmonisation de tous les logiciels utilisés par les différents acteurs.
Ce préalable technique demande également une coopération des acteurs dans leur moindre démarche professionnelle.

La montée en puissance sera donc lente, mais le résultat risque d'être à la hauteur des projets. Onze ans après la "dématérialisation fiscale" le "monde en blanc" se lance dans la même voie ! Avec de sérieuses économies à la clé !


Les débuts timides du dossier médical personnel
Les Echos du 27 octobre 2011
Jacques HENNO
Le DMP (dossier médical personnel) est enfin une réalité : tout Français, titulaire d'une carte Vitale, peut, en théorie, demander à un professionnel de santé (médecins, infirmiers, kinésithérapeutes, dentistes, infirmiers...) de lui en créer un. C'est un service public, gratuit et facultatif : ne pas avoir de DMP ne modifie pas l'accès aux soins, ni leur remboursement. Depuis avril 2011, plus de 24.000 personnes ont demandé l'ouverture de leur dossier - dont l'auteur de ces lignes (lire ci-dessous).
De l'aveu même des concepteurs du système, la montée en puissance sera longue : les serveurs informatiques, hébergés par le consortium Atos Origin-La Poste, sont dimensionnés pour accueillir seulement 5 millions de DMP d'ici à fin 2015. Mais, à terme, la France sera peut-être le premier grand pays développé à équiper tous ses administrés d'un carnet de santé électronique. Londres, qui avait lancé au début des années 2000 un projet similaire, vient de le suspendre. Seuls quatre « petits pays » ont réussi à convaincre presque tous leurs habitants des bienfaits de l'e-santé : le Danemark (5,5 millions d'habitants), Israël (7,7 millions) et la Suède (9 millions), plus la Communauté autonome d'Andalousie, en Espagne (7,9 millions). « Au Danemark, les personnes qui ont été hospitalisées peuvent accéder, via Internet, à tous leurs dossiers d'hospitalisation depuis 1977, mais les médecins généralistes ne devraient commencer à transférer leurs propres informations qu'à partir de l'année prochaine », détaille Kenneth Ahrensberg du Conseil national de l'e-santé danois.
Maîtriser les coûts
L'Australie, le Canada, les Etats-Unis, la Finlande, la Hollande et Singapour vont également adopter un dossier médical personnel. D'autres Etats suivront. « Confrontés à un vieillissement de leur population - et donc à une explosion des maladies chroniques -ainsi qu'à des contraintes budgétaires de plus en plus fortes, les pays développés doivent innover », analyse Jean-Yves Robin, directeur de l'Asip Santé (Agence des systèmes d'information partagés de santé), l'agence du ministère de la Santé en charge depuis 2009 du déploiement du DMP. Or le dossier médical personnel est censé permettre de mieux connaître l'état de santé du patient, d'éviter les erreurs médicales, en particulier les interactions médicamenteuses, et de diminuer les actes redondants (examens biologiques, radiologiques, etc.). « Mais il implique de passer à une nouvelle génération d'informatique médicale : la première était au service de la Sécurité sociale - pour payer les soins -, la deuxième au service des médecins dans leurs cabinets, la troisième tourne autour du patient et de son histoire médicale », explique Peter Levin, directeur informatique du ministère des Anciens Combattants américain, un organisme qui soigne 6 millions de personnes.
La France saura-t-elle vendre son savoir-faire dans ce domaine ? Sur le plan technique, son outil est au point. Reste le plus dur : convaincre les patients et, surtout, les 600.000 professionnels de santé concernés. « Les problèmes d'infrastructure sont derrière nous », assure Jean-Yves Robin. Les responsables du DMP n'en ont pas toujours dit autant. Premier obstacle : en 2004, le ministre de la Santé de l'époque, Philippe Douste-Blazy, avait mis la barre trop haut en assurant que le DMP serait réalisé en seulement trois ans et permettrait d'économiser 3,5 milliards d'euros par an. Depuis, on fait profil bas. « Le coût d'un DMP, c'est un euro par an et par patient : donc le retour sur investissement devrait être assez facile à obtenir », se contente de répondre Jean-Yves Robin lorsqu'on l'interroge sur les retombées du dossier médical personnel.
En test dans 4 régions
Deuxième malchance : le premier organisme en charge du projet, le GIP (groupement d'intérêt public) DMP, n'avait son mot à dire que sur le dossier médical. Or ce programme transversal ne peut fonctionner que si l'informatique des hôpitaux est remise à niveau, si les professionnels de santé sont tous dotés d'une carte leur permettant de s'identifier lorsqu'ils se connectent au dossier (c'est la CPS, carte de professionnel de santé) et si les logiciels utilisés par les médecins libéraux pour gérer les dossiers de leurs patients sont compatibles avec le DMP. Enfin, pour des raisons électorales, le projet fut mis en pointillé pendant toute la campagne présidentielle de 2007 et il a fallu ensuite dix-huit mois au nouveau gouvernement pour prendre une décision.
Relancé en 2009, avec une ouverture du service prévue pour la mi-2010, le DMP a finalement vu le jour en avril 2011 avec l'inauguration d'un portail ( dmp.gouv.fr) qui permet aux patients de consulter leur dossier sur Internet. L'Alsace, l'Aquitaine, la Franche-Comté et la Picardie servent actuellement de régions tests. Ailleurs, il est difficile de trouver un médecin qui sache ouvrir un DMP. « Je crois que l'interface entre Ameli (l'Assurance-maladie en ligne, NDLR) et le praticien n'est pas compatible avec la configuration Mac que j'utilise », botte en touche un généraliste. « Je n'ai rien reçu sur le DMP, ni de l'Ordre des médecins, ni de la Sécurité sociale, ni de l'Etat », grogne une cardiologue.
Réticence des médecins de ville
Convaincre les médecins va donc exiger de l'imagination. Les praticiens hospitaliers ne seront pas les plus rebelles. « Je suis foncièrement convaincu que, dans l'intérêt du patient, ses informations médicales doivent circuler et être partagées », clame Jean-Pierre Esterni, secrétaire général du SNAM HP (Syndicat national des médecins des hôpitaux publics). Les médecins de ville, eux, font de la résistance. « Le DMP a été fait sans nous : c'est un dossier de santé à la disposition du patient, qui peut même en cacher certaines données. Nous le laissons complètement de côté ! », prévient le docteur Michel Chassang, président de la CSMF (Confédération des syndicats médicaux français).
« Le DMP est très anxiogène pour les médecins en libéral, car leurs méthodes de travail pourront être scrutées par tous leurs collègues, traduit un ancien responsable du projet DMP. Or, ça, ils ne peuvent pas le dire et mettent donc en avant d'autres prétextes, comme le fait de ne pas avoir été suffisamment associés à l'élaboration du DMP, ou le manque d'incitation financière. Mais ce qui emportera l'adhésion des médecins, c'est la facilité avec laquelle leurs logiciels de gestion des dossiers patients pourront dialoguer avec les serveurs du DMP. » Tout dépendra donc de la compatibilité des outils informatiques des médecins. « La mise à jour des logiciels des professions de santé va prendre au moins deux ans », espère-t-on à l'Asip Santé. La saga du DMP n'est pas finie...
JACQUES HENNO, Les Echos

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