Les Secrets de Saint Pierre

Le camping de Kerhostin menacé, les campeurs en colère

Ouest France du 24 février 2016

 

Un ordre du jour du conseil municipal du 11 février fait des vagues. Il s'agit de la transformation du camping municipal de Kerhostin en aire de services dédiée aux camping-cars.

La polémique

« Depuis 1978, je n'ai loupé qu'une année. Je viens toujours au mois d'août, en caravane. Mes deux filles sont venues jusqu'à leurs 20 ans, et depuis six ans, c'est au tour du petit-fils. La nouvelle nous a énormément perturbés. Et même si des gens vont ailleurs, beaucoup ne viendront plus dans la presqu'île », avance Éric Bataillès, de Versailles. Il regrette de ne plus retrouver les copains cette année.

En effet, lors du dernier conseil municipal, il a été question de transformer le camping municipal de Kerhostin en aire de services pour les camping-cars.

Enfants, jeunes, vieux, tous sont contents de se revoir chaque été et de partager repas, apéros, ou parties de pêche en bateau.

Pétition et rassemblement

Ambiance familiale et vue sur mer, voilà ce qu'apprécie également France Lhoir qui, depuis 1962, fait route de la Belgique jusqu'à Kerhostin. « La première fois que je suis venue, j'avais 12 ans. Aujourd'hui, j'en ai 65. Et je viens avec mes petits-enfants. On se retrouve entre amis. C'est un petit camping d'une centaine de places, où l'entraide existe, apprécie France. On se dépanne, on partage le poisson qu'on a pêché. On vient juste d'être prévenus, alors que nous avons payé l'hivernage de nos caravanes », déplore France Lhoir, qui a lancé une pétition en ligne.

En une semaine, plus de 900 signatures ont été recueillies. Cette campeuse invétérée envisage un rassemblement devant la mairie le 19 mars, où tous les habitués de Kerhostin, Lyonnais, Parisiens, gens du Nord, sont invités.

« On vendra la caravane »

Les campeurs sont en colère. « On ne retrouvera plus les copains, leurs parents, ni les enfants qu'on a vu grandir, ou même faire leurs premiers pas. Nous sommes très mécontents de ce projet. Et on n'y croit pas. Pourquoi injecter 75 000 € de travaux alors que rien n'y a jamais été fait ? Je pense que ce ne sera pas rentable, et qu'il se cache quelque chose derrière, assène Philippe Ramage, Rennais. Quand on voit la parcelle d'à côté vendue 40 € le m², on se pose des questions. Surtout que l'aire de camping-cars de Kergroix n'est jamais remplie. »

Venant à Kerhostin depuis plus de trente ans, il n'ira dans aucun des deux campings suggérés dans le courrier de la mairie.

Tout comme Vanessa Gire, de Seine-et-Marne, fréquentant le petit camping depuis quinze ans. « Le camping, c'est là, et pas ailleurs ! Ils vont gâcher notre histoire pour rien. Et on vendra la caravane. »

La municipalité de Saint Pierre Quiberon cherche à diversifier son offre d'accueil

Ouest France du 24 février 2016

Entretien

Roger Jofes, adjoint chargé des bâtiments, services techniques, campings, artisans et commerçants

Pourquoi la mairie veut-elle transformer le camping de Kerhostin ?

Nous avons constaté que l'ancienne municipalité a laissé faire le camping-caravaning sauvage à l'isthme de Penthièvre et à Kergroix, sans se soucier de l'environnement. Kergroix n'est pas une aire de camping, mais une borne de service pour prendre de l'eau et faire la vidange. Les gens y restaient, mais elle n'est ni équipée ni aux normes. On les a fait fermer, dans la mesure où l'atteinte à l'environnement engendrait aussi une dépense d'argent public lors du ramassage des détritus.

Vous auriez pu trouver un autre endroit pour les camping-cars...

Nous avons d'abord envisagé d'aménager ces sites. À Kergroix, nous ne sommes pas chez nous, et le Conservatoire du littoral a refusé. À Penthièvre, les investissements dans les réseaux auraient été faramineux. On a cherché d'autres endroits, il n'y en a pas sur la commune. Or, dans nos trois campings municipaux, si celui du Rohu est complet en saison, ceux de Kerhostin et Penthièvre, non. D'où cette réflexion.

Quelle réflexion ?

À Plouharnel et Quiberon existent des aires pour les camping-cars, pas à Saint-Pierre. Il nous semble cohérent de diversifier l'offre d'accueil, et d'attirer cette clientèle. La faire s'arrêter dans la commune afin qu'elle y consomme et développe le commerce. D'où l'idée de réaménager le camping de Kerhostin. C'est à la fois un développement économique et un encadrement des camping-cars.

Que répondez-vous au sujet du coût des travaux ?

On sollicite des subventions, et les trois quarts des travaux sont financés par la vente d'une parcelle vendue l'an dernier et de celle de 700 m². Je le répète, le domaine l'a estimée à 1 € le m², je pense que notre prix de 40 € est correct. En ce qui concerne la rentabilité, on a étudié des sites de ce genre, et on est sur un amortissement de deux ans.

Que pensez-vous de la colère des campeurs ?

Il y a des gens qui viennent depuis longtemps, mais une vingtaine de familles, pas 900. On leur a proposé de leur réserver un secteur en bord de mer à Penthièvre, qui est à côté. Bien sûr, je comprends leur désarroi et leur déception. Mais à un moment, il faut faire des choix. On n'est pas une commune riche, et on va perdre 70 000 € de dotations de l'État par an. Soit on augmente les impôts, ce qu'on n'a pas voulu, soit on baisse les dépenses et on augmente les recettes. On cherche et on se bat pour trouver des solutions.