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20/02/2016

En France, la "main" de l'Etat est un peu lourde...

Trains, Nucléaire, perquisitions, les décisions "déraisonnables" d'un Etat touche à tout !

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Le développement de la vitesse en TGV devait condamner les "nuits en train" sur des trajets de 8 heures ! La concurrence de la voiture individuelle (en famille, c'est moins cher !), de l'avion "low cost", de l'autocar et du covoiturage ont accentué le "côté ringard" des trains couchettes...

Au lieu de couper les dépenses inutiles, on maintient un service obsolète...

Dans le nucléaire, la France prend son indépendance du donneur de licence américain et construit des matériels "hyper sophistiqués", dont la vente à l'exportation est un échec patent...les japonais, puis les chinois fabriquent du matériel robuste et plus simple, enlèvent les marchés et enferment AREVA dans le marché intérieur ! 10 milliards en fumée...

L'Etat d'urgence, pour la bonne cause génère plus de 3 000 perquisitions avec des saisies informatiques... sans aucun contrôle judiciaire... Le Conseil Constitutionnel, saisi par la Ligue des Droits de l'Homme, censure partiellement la loi instaurant ce régime d'exception...

La France "souffre" de cette présence de l'Etat dans tous les secteurs de l'économie !


L’État consacrera 2 milliards d’euros aux trains Intercités d’ici à 2025

Le Figaro du 20 février 2016

Un appel d’offres sera lancé cette année pour remplacer les Corail et la SNCF est appelée à améliorer son offre et le service à bord.

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Valérie Collet

Alain Delpey, Cit'images

L’avenir des trains Intercités se précise petit à petit. Le parc de ces trains « grandes ­lignes », les Corail des années 1970 et 80, devrait être entièrement renouvelé d’ici à 2025 comme l’avait déjà évoqué Alain Vidalies, le secrétaire d’État aux Transports. Il a en revanche ­annoncé vendredi, lors d’un point d’étape, que l’État lancerait un nouvel appel d’offres, via SNCF Mobilités, filiale de la SNCF chargée de l’exploitation des trains, pour l’achat de nouvelles rames pour 1,5 milliard d’euros, comme Le Figaro l’avait révélé le 20 janvier. Leur livraison pourrait démarrer au mieux en 2020.

Alain Vidalies a justifié cette décision en mettant l’accent sur les attentes des voyageurs pour les lignes « structurantes » de ce réseau Paris-Limoges-Toulouse, Paris-Clermont-Ferrand, Bordeaux-Toulouse-Marseille. De nouveaux trains roulant à une vitesse de plus de 200 km/h sur ces parcours longs devraient offrir plus de confort et de services à bord.

À ces trois liaisons s’ajoute ­Paris-Caen-Cherbourg, qui nécessitera des trains à deux niveaux qui pourraient être commandés à Bombardier, soit dans le cadre d’un ancien appel d’offres déjà lancé pour l’achat de trains régionaux, soit dans le cadre de cette nouvelle procédure. Un sort particulier a été réservé aux lignes Intercités passant par la nouvelle région Normandie (Paris-Rouen-Le Havre, Paris-Caen-Cherbourg, Paris-Granville). Son président, Hervé ­Morin, a fait savoir jeudi qu’il était prêt à en prendre la gouvernance - et à en financer le déficit - si l’État prenait en charge l’achat du matériel neuf.

L’appel d’offres de 1,5 milliard d’euros pour une quarantaine de rames sera complété par un lot de consolation de 400 millions d’euros pour Alstom avec la commande, de gré à gré, de 30 rames supplémentaires destinées cette fois aux lignes ­Intercités plus courtes (lire ci-dessous).

Derrière le renouvellement des trains se cache un jeu de mistigri portant sur la gestion des lignes Intercités. L’État s’en est longtemps désintéressé et la SNCF n’a pas réussi à les moderniser. L’urgence est avant tout économique. Le déficit des Intercités s’élèvera cette année à 400 millions d’euros pour la SNCF et dans une moindre mesure à l’État. Ce montant est équivalent à la perte dégagée l’an dernier alors qu’en 2014, elle atteignait déjà 330 millions d’euros.

La concurrence est « inenvisageable »

Les pertes n’ont cessé de se creuser sur ces 30 lignes que les voyageurs désertent un peu plus chaque année. « La fréquentation des Intercités a chuté de 20 % depuis 2011, relève Alain Vidalies qui souligne que leur exploitation est devenue insoutenable. »

L’État a donc engagé une concertation avec les régions pour leur confier la gestion des lignes qu’elles jugeraient stratégiques et dont elles pourraient financer les éventuels déficits. Le préfet François Philizot, mandaté par l’État en juillet pour mener cette concertation, devrait remettre ses conclusions d’ici au mois de mai. Alain Vidalies a évoqué sa rencontre - fructueuse - avec Hervé Morin et avec Carole Delga, la présidente de la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées.

Il n’est pas question en revanche d’ouvrir l’exploitation de ces lignes à d’autres opérateurs que la SNCF : «Ce n’est ni envisageable ni envisagé », a précisé Alain Vidalies. Le secrétaire d’État a toutefois froncé les sourcils au sujet de SNCF Mobilités : «Nous avons demandé à la SNCF de placer le voyageur au cœur de son action en réduisant les dysfonctionnements, en améliorant la propreté à bord des trains et en augmentant sa politique de petits prix, a-t-il rappelé. Ainsi, le nombre de trains avec réduction devrait être multiplié par trois en 2016.»

 

Jean-Bernard Lévy, l’électricité est la principale solution au problème du climat

LE MONDE ECONOMIE du 19 février 2016

Vincent Giret et Philippe Escande (Propos recueillis par)

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De gauche à droite: Philippe Escande, Jean-Marc Jancovici (essayiste, spécialiste de l'énergie et du climat), Jean-Bernard Lévy (PDG d'EDF) et Vincent Giret. Jean-Luc Luyssen

Face aux contraintes du dérèglement du climat et à la nécessité d’y faire face, comment voyez-vous évoluer la « planète énergie » dans les dix ans qui viennent ?

Jean-Bernard Lévy : Je voudrais dire une chose à laquelle je crois profondément : l’électricité est aujourd’hui la principale solution au problème du réchauffement climatique. Les émissions de carbone proviennent de nombreuses sources, en particulier dans le domaine du transport et du logement. La production d’électricité n’en représente qu’une partie. Et parmi les différentes sources d’émission de carbone, l’électricité est celle qui bouge le plus vite vers la décarbonation.

Lire aussi : Jean-Bernard Lévy : « L’équation financière d’EDF est difficile »

En France, nous produisons de l’électricité – et cela fonctionne très bien – en émettant très peu de dioxyde de carbone (CO2). La moyenne européenne est à 325 grammes par kilowattheure contre 15 grammes pour l’Hexagone ! En Allemagne, le niveau de production est supérieur à 400 grammes par kilowattheure. Grâce à un bon mix énergétique et à un bon mix électrique, l’électricité peut donc produire très peu de carbone. Or, ce mix est essentiellement lié au nucléaire et aux énergies renouvelables : l’hydraulique, le solaire, l’éolien, la biomasse, etc. Du fait de cette bonne équation, nous dégageons très peu d’énergies fossiles, et l’électricité est la bonne solution. Nous devons tout faire pour substituer l’électricité à d’autres formes d’énergie, en particulier dans le secteur du logement et dans celui des transports.

Lire aussi : Combien de CO2 contribuez-vous à émettre dans l’atmosphère ?

Sur le plan de l’équation financière, le nucléaire a pris deux coups sur la tête. Le premier est lié à la catastrophe de Fukushima, en 2011, et le second au chantier finlandais de l’EPR d’Olkiluoto, qui n’en finit pas de déraper et tourne au fiasco. La filière peut-elle s’en relever ?

J-B. L. : Le nucléaire dans le monde n’est absolument pas un fiasco. L’Agence internationale de l’énergie prévoit une très forte croissance de l’électricité d’origine nucléaire d’ici à 2040. Chaque année, les Chinois, qui avaient suspendu leur production à la suite de la catastrophe de Fukushima, commandent désormais entre six et huit centrales. Les Russes et les Américains en construisent également. Quant aux Finlandais et aux Français, ils bâtissent aussi des centrales. Enfin, de très nombreux pays qui ne produisent pas d’électricité d’origine nucléaire nous consultent malgré les vicissitudes de l’EPR.

Lire aussi : Emmanuel Macron veut en finir avec le bourbier de l’EPR finlandais

Nous sommes persuadés que nous assisterons à une croissance du parc nucléaire dans le monde. Pour ce qui concerne les difficultés rencontrées sur certains chantiers, j’en ai déduit que nous n’avions pas les moyens aujourd’hui d’avoir deux équipes tricolores qui jouent le rôle d’architecte ensemblier, ou d’ingénieur et d’intégrateur d’une centrale nucléaire. C’est la raison pour laquelle j’ai proposé, en 2015, au gouvernement français qu’EDF reprenne les activités de réacteur d’Areva.

Pourtant, les logiques actuelles de prix et le montant énorme des investissements nécessaires ne jouent pas en faveur du nucléaire. Cette technologie ne risque-t-elle pas d’être condamnée en raison de son coût ?

J-B. L. : Je ne le crois pas, mais elle est en effet mise en péril par le mode de régulation retenu pour le moment en Europe. Il a conduit à un effondrement des prix de l’électricité, de 40 à 26 euros le mégawattheure (MWh), après avoir atteint 60 euros en 2011-2012.

La consommation d’électricité n’augmente pas sur le Vieux Continent, alors que l’offre progresse en raison des énergies renouvelables subventionnées. La croissance du marché s’établit à 2 % ou 3 % par an, alors que la consommation n’augmente pas. La situation se régule avec un prix de vente correspondant au coût marginal du dernier outil de production, c’est-à-dire de la dernière usine fonctionnant au prix de la demande.

La question se pose donc de savoir comment justifier un investissement à temps long dans le nucléaire lorsque les signaux de prix sont bas. Lorsque le marché est déséquilibré, il faut garantir un prix pour le nucléaire comme pour les énergies renouvelables. C’est le choix retenu, à juste titre, par les Britanniques.

La filière française du nucléaire est en cours de réorganisation. La loi de transition énergétique votée à l’été 2015 par les députés se donne pour objectif de ramener la part du nucléaire de 75 % à 50 % d’ici à 2025. Est-ce réaliste, utile et faisable ?

J-B. L. : La loi de transition énergétique vise à développer fortement l’électricité à base d’énergie renouvelable et à promouvoir l’électricité par rapport à d’autres formes de consommation d’énergie. (…) Le marché de l’électricité peut donc continuer de croître. A l’horizon 2025, le gouvernement français doit résoudre cette équation par la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).

Paris a indiqué vouloir lancer bientôt un débat pour montrer comment gérer ces équilibres. Ce n’est pas incompatible avec le nucléaire (…). Notre parc doit continuer de fonctionner au niveau actuel. La puissance globale de 63 gigawatts est un plafond, mais aussi un plancher. Nous avons des investissements pour le renouveler et le rendre plus efficace. Il a été conçu avant Fukushima, un accident dont nous avons tiré les leçons. L’Autorité de sûreté nucléaire nous demande aujourd’hui de les appliquer.

La France a-t-elle raison de vouloir à tout prix exporter son nucléaire ?

Jean-Marc Jancovici : Depuis vingt ans, les dirigeants politiques ont fait beaucoup de mal à notre potentiel nucléaire dans l’Hexagone et à l’export. Ils l’ont souvent sacrifié au nom d’arrangements très politiques. Ces petits jeux nous ont privés d’une partie des marchés étrangers. La France pourrait être beaucoup plus forte aujourd’hui. Elle est certes présente en Chine, mais, ailleurs, elle se fait tailler des croupières par des acteurs dont les offres sont financées, comme celles des Japonais. Nous avons fait des choix qui ne correspondent pas à des organisations simples, robustes et efficaces.

Lire aussi : EDF : Le coût de l’EPR britannique d’Hinkley Point inquiète

L’Allemagne a fait un autre choix, en décidant d’abandonner le nucléaire. Vous considérez, M. Jancovici, que cette décision est coûteuse et contre-productive en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Pour quelles raisons ?

J-M.J. : J’ai étudié comment les émissions de l’Allemagne ont évolué de 1995 à nos jours. J’ai donc pris en compte les investissements totaux dans les énergies renouvelables, auxquels j’ai ajouté les coûts annexes. En première approximation, lorsque l’on investit un euro dans une éolienne ou un panneau solaire, il faut ajouter 0,7 ou 0,8 euro en coûts d’infrastructure – pour le renforcement du réseau, la création de postes sources, la construction de tranchées, etc. En faisant ce calcul, les investissements bruts de l’Allemagne ont été proches de 300 à 350 milliards d’euros sur les énergies renouvelables.

En France, nous produisons 60 gigawattheures d’énergie nucléaire. Une centrale neuve coûte de 6 à 7 milliards d’euros, ce qui donne un total de 250 milliards d’euros pour remplacer tout le parc existant, auxquels il faut ajouter 100 milliards d’euros de coûts divers, soit la même somme, 350 milliards d’euros ! Pour ce prix, les Allemands sont passés de 4 % à 28 % d’électricité renouvelable dans leur mix, dont une partie est consommée en interne, une autre étant exportée, lorsque le vent souffle et le soleil brille. Et ils ont continué à investir dans le charbon. Aussi, 8 % de leur électricité vient du biogaz, ce pour quoi les Allemands ont mis en culture 1 million d’hectares de maïs de fourrage destiné aux méthaniseurs.

Lire aussi : EDF, la fin d’un monopole… et d’une époque

L’Allemagne, qui présente un solde exportateur de 200 milliards d’euros net par an et dont la population décroît, peut se permettre, pour le moment, de privilégier ce mix, extrêmement coûteux. Mais nous verrons combien de temps cela durera. Cependant, même avec des centaines de tétrawattheures, nous n’aurons jamais un système totalement éolien et solaire, compte tenu de l’intermittence. Je considère que la question du droit des Allemands de décider seul d’un programme qui met en difficulté les pays voisins se discute.

  1. Lévy, la politique énergétique allemande va-t-elle dans le mur, comme le dit M. Jancovici ?

J-B. L. : En 2015, l’Allemagne a mis en service l’équivalent de deux EPR, ou plus de 3 000 mégawatts, en centrales à charbon neuves. Elles émettent beaucoup de gaz à effet de serre. Le tournant énergétique outre-Rhin est censé respecter les engagements de Berlin en matière de décarbonation, mais tout le monde s’interroge sur la capacité de l’Allemagne à respecter ses engagements…

Le plan « Cap 2030 » prévoit de doubler les capacités d’EDF dans les énergies renouvelables en Europe d’ici à quinze ans. Pourquoi ce choix et comment comptez-vous atteindre cet objectif ?

J-B.L. : Nous avons l’intention de doubler ces capacités au-delà de l’Europe. Un point fort de la stratégie « Cap 2030 » est qu’on ne peut pas rester à 95 % un groupe européen comme nous le sommes aujourd’hui. La croissance économique et démographique a lieu en dehors du Vieux Continent. Nous devons chercher l’activité là où la croissance est la plus importante. Notre stratégie consiste à développer des énergies renouvelables, de l’hydraulique, de l’éolien et du solaire, notamment dans les pays où la nature a donné des prix plus bas et des conditions d’accueil plus favorables.

Dans la plupart des pays du monde, nous construisons des projets d’énergies renouvelables avec un horizon de deux à trois ans. En France, il faut sept ans pour créer des fermes éoliennes banalisées en tenant compte des recours… Le soleil est tellement fort et présent dans certains pays que le prix de production est très compétitif, notamment dans les territoires où une partie peut être consommée sur place, même s’il n’y a pas de réseau.

  1. Jancovici, vous donnez l’impression que nous sommes victimes d’une sorte d’hallucination collective sur le potentiel des énergies renouvelables. N’est-ce pas un peu exagéré ?

J-M.J. : Quand on pense aux énergies renouvelables en France, on pense d’abord à l’éolien et au solaire. Or, l’énergie renouvelable électrique qui a le plus augmenté dans le monde est l’hydraulique. Elle représente cinq à six fois la production éolienne dans le monde. Cela reste de très loin la première production.

Les énergies renouvelables dépendent de la géographie. En Suède, pays de 9 millions d’habitants sur 350 000 kilomètres carrés composés à 70 % de forêts, il est extrêmement facile d’avoir énormément d’énergies renouvelables dans l’approvisionnement. Cela n’empêche pas les Suédois d’être les principaux consommateurs d’électricité nucléaire par personne en Europe, devant les Français. Vous avez énormément de biomasse pour faire tourner l’industrie et alimenter le chauffage. On pourrait faire quasiment 100 % d’énergies renouvelables si la France ne comptait que 10 millions d’habitants.

La question de l’approvisionnement en énergies renouvelables dépend de la géographie, mais la démographie ne dépend pas essentiellement de la géographie. Chaque pays a ses singularités. Le développement du solaire au Maghreb me semble extrêmement pertinent. Mon argent de contribuable devrait être utilisé pour produire du solaire sur la rive sud de la Méditerranée pour aider ces pays, plutôt que de prétendre remplacer en France une partie du nucléaire par du solaire, ce qui ne présente aucun intérêt.

Mais attention, je ne suis pas contre les énergies renouvelables par principe ni pour le nucléaire par principe. Je dis simplement que nous entrons dans un monde fini, où nous devons privilégier ce qui utilise le moins d’énergies fossiles par euro investi.

Le remplacement du nucléaire par le solaire photovoltaïque et l’éolien mène à l’exact inverse. Le coût de CO2 évité par le photovoltaïque est de plusieurs milliers d’euros par tonne. En passant des logements énergivores au fuel à des systèmes avec pompes à chaleur, nous passerions de 0 à 20 tonnes de CO2 évitées. Ce genre de décision serait bonne pour la planète et pour l’économie. Il est beaucoup plus urgent de subventionner ce type de solutions que le développement des éoliennes et des panneaux solaires.

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/le-club-de-l-economie/article/2016/02/19/jean-bernard-levy-l-electricite-est-la-principale-solution-au-probleme-du-climat_4868365_4795074.html#ydIHHElFfmFP0CsX.99

 

Etat d'urgence, pourquoi les saisies informatiques ont été jugées contraires à la Constitution

LIBERATION du 19 février 2016

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Pour le Conseil Constitutionnel, l’équilibre entre la sauvegarde de l’ordre public et le respect de la vie privé est rompu lorsque la police aspire toutes les données d’un particulier, sans contrôle d’un juge. AFP

Saisi par la Ligue des droits de l'homme, le Conseil constitutionnel a très partiellement censuré la loi instaurant ce régime d'exception.

C’est l’un des rituels auxquels se livrent les policiers lors des perquisitions administratives depuis l’instauration de l’état d’urgence : outre les fouilles minutieuses, ou brutales, les fonctionnaires du ministère de l’Intérieur copient les données trouvées sur les tablettes, smartphones et ordinateurs (sauf quand ça ne fonctionne pas). Ils vont devoir arrêter. Saisi par la ligue des droits de l’homme, le Conseil constitutionnel a censuré la disposition de la loi qui l’autorisait.

Pourquoi cette censure ?

Le défenseur des droits avait averti en janvier : «Le recueil des données personnelles lors des saisies informatiques dématérialisées doit être entouré de garanties quant à l’usage desdites données.» Les «sages» partagent cette recommandation et vont plus loin. Pour le Conseil constitutionnel, l’équilibre entre la sauvegarde de l’ordre public et le respect de la vie privé est rompu lorsque la police aspire toutes les données d’un particulier, sans contrôle d’un juge.

Dans le commentaire de sa décision, le Conseil constitutionnel cite par exemple les «éléments "intimes" dépourvus de tout lien avec la menace que représenterait l’intéressé», qui sont néanmoins copiés. Trop de données, un lien trop lointain avec une éventuelle infraction et un encadrement insuffisant ont convaincu les membres du Conseil Constitutionnel de déclarer non conforme à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, et donc à la loi fondamentale.

A quoi servaient les données saisies ?

C’est le grand flou et l’une des raisons qui a poussé la Ligue des droits de l’homme à déposer une question prioritaire de constitutionnalité sur ce point. L’avocat de l’ONG, Patrice Spinosi, expliquait ainsi que «la loi sur l’état d’urgence ne prévoit pas plus de quelconque encadrement des données copiées». Le ministère de l’Intérieur n’a jamais été très prolixe sur ce point.

A l’Assemblée, lors du débat en commission sur la prolongation de l’état d’urgence, Bernard Cazeneuve réfutait l’utilité très marginale de l’état d’urgence dans la lutte contre le terrorisme. Un constat qu’avait pourtant dressé Jean-Jacques Urvoas – devenu depuis garde des Sceaux – lorsqu’il présidait la commission de contrôle parlementaire.

Le 11 février, le ministre de l’Intérieur disait attendre beaucoup des données saisies : «On ne peut pas savoir aujourd’hui combien de personnes seront, in fine, mises en cause pour des infractions terroristes : une grande partie des éléments récupérés lors des perquisitions n’ont pas encore été exploités, notamment les données informatiques. C’est au terme des investigations que nous pourrons connaître le nombre de réseaux démantelés, le nombre de personnes concernées, et les résultats pour la lutte antiterroriste des perquisitions menées.»

Que vont-elles devenir ?

Les données copiées lors des perquisitions doivent être détruites, comme l’a indiqué sur Twitter le juriste Nicolas Hervieu. La Cnil, gendarme de la vie privée, n’a pas été consultée par le gouvernement sur la loi sur l’état d’urgence. Elle ne devrait donc pas superviser la suppression des données abusivement récoltées.

 

 

 

Commentaires

Quel rapport vois-tu entre l'état d'urgence et l'économie, si ce n'est mettre en évidence la confusion de tes pensées?

Écrit par : JPD | 21/02/2016

Toujours charmant, le JPD...

Écrit par : jeanbart | 21/02/2016

Les commentaires sont fermés.