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20/07/2015

La "productivité", la solution des marchés agro-alimentaires...

Dans l'élevage, la France est restée "familiale" !

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Aves ses mérites et ses inconvénients ! Produit de qualité, mais cher en période de crise...

La "ferme des mille vaches" déconcerte la Confédération paysanne, très attachée au mode de vie des élevages de 50 têtes... ainsi que la plupart des éleveurs bretons.

Le marché commun, dont les prix en euros confrontent les offres de chaque pays, exacerbe, dans le cycle haut de la production, les différences de productivité : réglementations tatillonnes, durée du travail, main d'œuvre étrangère, style de vie...

Le "libre-échange" pousse les prix vers le bas, jusqu'au prix de revient... les utilisateurs d'aliments étrangers sont étranglés par la hausse des "intrants"...

La politique "imprévoyante" de nos dirigeants à l'égard de la Russie fait basculer le marché dans la "sur-production"...

Un "Poutine" vaut mieux que "mille vaches" !


Crise de la viande, qui ne joue pas le jeu ?

Télégramme du 20 juillet 2015

Flore Limantour

 

Caen est en état de siège !

Plusieurs centaines d'éleveurs de porcs et de bovins, ainsi que des producteurs de lait du Calvados, manifestent depuis ce dimanche aux abords de Caen contre la faiblesse des prix de leurs produits et la «situation très tendue» du monde agricole. Les quatre principaux accès au périphérique de Caen sont actuellement bloqués.

Les manifestants réclament la venue de Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture, sur place. Ils menacent aussi de bloquer, ce lundi, plusieurs entreprises de la région : de transformation, des abattoirs, des grandes surfaces. En Bretagne, comme en Normandie, les producteurs de porcs, notamment, sont dans une situation financière et humaine dramatique. De très nombreuses manifestations en témoignent.

Pourquoi la crise les affecte-t-elle aujourd'hui ? Qui ne joue pas le jeu dans la filière ?

Nous avons interrogé trois acteurs du secteur :

Michel Bloch, président de l'Union des producteurs de viande de Bretagne (UGPVB), Paul Rouche, directeur délégué porc du syndicat des entreprises françaises de viande (Sniv) et Serge Papin, P-DG de Système U. Aucun représentant des organisations de salaisonniers n'a donné suite à nos demandes d'entretien. En complément Michel Bloch (président de l'Union des producteurs de viande de Bretagne) « Ce sont les grandes marques de salaisons, les Herta et autres Madrange, qui sont les premiers responsables de la crise en achetant de la viande étrangère. Pas les marques distributeurs Leclerc ou Intermarché qui, elles, jouent le jeu. On ne demande pas que les consommateurs soient obligés de manger français, mais qu'ils aient le choix.

Il faut savoir que 70 % d'un cochon part en produits de salaisons.

Des produits très majoritairement non identifiés. On veut donc un étiquetage des produits transformés. Comme ça, on pourra communiquer sur un cahier des charges. Et du coup dénoncer le dumping social.

Parce qu'on subit une très forte distorsion de concurrence avec les Allemands qui font travailler des Ukrainiens à 6 euros de l'heure et les Espagnols des Marocains au même tarif.

Moi je crois en l'économie de marché... À condition que tout le monde ait les mêmes règles du jeu. Evidemment, notre discours n'est pas de dire que les salariés de l'agroalimentaire français sont trop payés. »

« Les politiques n'y croient plus »

« On pousse Stéphane Le Foll à mettre en place l'étiquetage, mais il nous dit que l'Europe n'est pas d'accord. On sent que les politiques n'y croient plus. De leur côté, les industriels de l'agroalimentaire tapent sur la grande distribution. Mais, en viande fraîche, la plupart des grandes enseignes jouent le jeu du porc français, en frais en acceptant de payer plus cher qu'au cadran. De notre côté, il faut reconnaître que les producteurs ne sont pas toujours taillés pour la course à l'heure actuelle. Il faudrait reconstruire du neuf, rationaliser les installations. Globalement, il y a un nouveau modèle à repenser.

Il faut que les Espagnols et les Allemands cessent de développer anarchiquement leur production. Quand on réfléchit, il ne faudrait pas grand-chose. Il nous manque 20 centimes du kg.

Un Français mange en moyenne 30 kg de porc par an.

Si on fait le calcul, ça ne lui coûterait que 6 euros de plus par an... »

Serge Papin (P-DG de Système U)

« Chez Système U, 100 % de la viande fraîche est VPF, viande de porc français. Ce n'est pas le cas de tout le monde. On prend en compte les difficultés des différentes filières dont celle du porc. Et ce n'est pas de la démagogie, ce sont des paroles sincères. Je pense que c'est la Loi de modernisation de l'économie (LME) qui nourrit la guerre des prix et met à mal les plus fragiles, pendant les négociations commerciales. Je regrette de ne pas avoir été entendu par les politiques à ce sujet. Concernant les producteurs, il faut faire la part des choses entre l'export et la France.

Pour la compétition à l'export, je renvoie les pouvoirs publics sur le problème de la distorsion du coût du travail avec l'Espagne et l'Allemagne où les outils d'abattage sont aussi très automatisés...

Chez nous, il y a une mutation à faire.

La compétitivité ne dépend pas que des producteurs. La grande distribution peut les accompagner. Nous sommes les alliés des producteurs. »

« Baliser les produits dans les rayons »

« Que faire sur le marché français ? Il faut soutenir les prix et acheter le porc sur la base d'1,40 euro. On ne l'a pas vraiment fait, parce qu'on n'achète pas directement aux producteurs, mais aux transformateurs. Les abattoirs nous disent : "C'est le cadran de Plérin qui fait le prix". Il faudrait le "bypasser", le contourner. En pratique, comment Système U s'engage ? Nous avons envoyé par recommandé à nos abattoirs un courrier pour acheter le porc à 1,40 euro. Nous envisageons de mettre en place un mécanisme de contribution en pied de facture avec la somme destinée au producteur en détouré pour qu'il y ait une transparence dans les prix. On pourrait aussi peut-être envisager une augmentation de la taxe versée à Inaporc pour que l'argent aille au producteur.

Dans les rayons, nous sommes favorables à un balisage des produits pour que les consommateurs s'y retrouvent. Nous allons aussi y pratiquer des prix appropriés sur les promotions. Mais il faut qu'on dégage du porc, il y en a trop. »

Paul Rouche (Directeur délégué porc du syndicat des entreprises françaises de viande).

« La production est en crise. Ce qu'on ne sait pas toujours, c'est que l'abattage-découpe aussi. Normalement, notre rôle est de valoriser la production. Mais en ce moment, on ne peut pas payer plus cher les producteurs, puisqu'il nous est difficile de valoriser ensuite le porc auprès des salaisonniers et des distributeurs.

Cette année, l'offre européenne est plus importante, tandis que la consommation est en baisse. L'absence du marché russe a laissé des traces en volume et en prix. C'était un marché qui absorbait de gros volumes avec une grande élasticité de la consommation.

« La solidarité est nécessaire »

« En France, les distributeurs, les grandes surfaces, jouent le jeu pour la viande fraîche, ils achètent français.

Mais les salaisonniers qui utilisent 70 % du porc pour la transformation trouvent de la viande 15 à 20 % moins cher dans les pays voisins. Pour la première année, l'export et l'import de porc en France sont au même niveau. Je me mets à leur place, d'autant qu'il faut tenir compte de la compétitivité de leurs outils qui nécessitent plus de main-d'oeuvre que dans d'autres pays européens. Seulement, en période de grande difficulté comme aujourd'hui, la solidarité est nécessaire, sinon la filière va s'effondrer. Les transformateurs doivent défendre l'affichage de l'origine.

En France, il y a toute une frange des consommateurs qui est prête à acheter français. En Espagne, ils y arrivent bien avec des logos, des drapeaux, etc. 90 % des consommateurs espagnols achètent des produits espagnols. Les producteurs sont mieux payés. En France, les industriels sont tous prêts à jouer le jeu individuellement... Si le voisin le fait aussi. Quant aux demandes de Serge Papin, on est prêt à acheter plus cher pour lui s'il est prêt à vendre plus cher. On le voit, il y a finalement un problème du côté des transformateurs, de l'export, des consommateurs, de la compétitivité... Pas seulement du côté des salaisons. Et en ce moment, c'est le marché grec qui pose à son tour problème. »

© Le Télégramme - Plus d’information sur http://www.letelegramme.fr/economie/crise-du-porc-trois-a...


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