13/12/2014
Breton ou basque ?
Pierre Loti eut beaucoup de "passions"...
Paimpol n'est qu'une étape dans la vie de l'auteur célèbre. Sa maison "natale" est à Rochefort, où il aimait recevoir et défiler "costumé"...Le pays basque conserve également des traces visibles de son passage...
Il aimait à dire, qu'il préférait les basques aux bretonnes...
Pierre Loti, union sacrée pour une statue
Télégramme du 13 décembre 2014
Roselyne Veissid
Entre Charly Sallé et Serge Le Quéau (à droite), une belle complicité s'est établie autour de ce projet exceptionnel. Paimpol doit un peu de sa renommée à Pierre Loti. Mais depuis plus de 80 ans, tous les projets de monument en hommage à l'écrivain avaient échoué. Les efforts conjugués d'un militant anticapitaliste, d'un prêtre et d'une milliardaire vont enfin aboutir à l'installation d'une statue sur le port ! C'est l'histoire d'une alliance extraordinaire : celle d'un syndicaliste de Saint-Brieuc, cofondateur d'Attac, mouvement farouchement anticapitaliste, d'un dignitaire ecclésiastique d'origine paimpolaise, bardé de diplômes et de décorations, et d'une milliardaire ayant des attaches dans les Côtes-d'Armor... Cette union sacrée aboutira, en février prochain, à l'érection d'une statue à la mémoire de Pierre Loti, l'auteur de « Pêcheur d'Islande », magistrale évocation de la vie des marins paimpolais qui fait pleurer dans les chaumières depuis bientôt 130 ans.
La passion de Serge Le Quéau pour la littérature a vaincu des obstacles restés infranchissables durant des décennies et va lui permettre d'honorer la promesse faite sur son lit de mort ou presque à Mgr Jean Kerlévéo.
Ce prêtre érudit, grand admirateur de Loti, confia, en 1999, au syndicaliste le soin de faire aboutir un projet de monument repoussé à cinq reprises en 70 ans. La maquette existait, dans les réserves du musée d'art et d'histoire de Saint-Brieuc. Représentant « Les Veuves d'Islandais », la jolie Gaud et la grand-mère Moan du roman, elle valut au sculpteur briochin Francis Renaud une médaille d'or au Salon des artistes français de 1932. Mais le sculpteur mourut quarante ans plus tard sans avoir vu réaliser, faute de commande publique, l'oeuvre qui faisait sa fierté.
Prêtre blanc et syndicaliste rouge...
Animés d'une même dévotion littéraire, Jean Kerlévéo et Serge Le Quéau ont fait fi de leurs différences pour communier autour de Loti. « Le prêtre blanc trinquait volontiers avec le syndicaliste rouge ! », souligne, ému, le second. Mais entre le syndicaliste et l'écrivain orientaliste, les choses n'avaient pas très bien commencé... Grand lecteur, Serge Le Quéau avait d'abord laissé de côté le « Roman d'un spahi », sélectionné par sa femme dans la bibliothèque des vacances d'été. « J'avais lu "Pêcheur d'Islande" à l'adolescence mais je jugeais l'auteur désuet », confie-t-il. Faute de grives, on mange des merles : sa provision de lecture épuisée, Serge n'eut d'autre ressource que de se plonger dans l'oeuvre de Loti. Ce fut une révélation. « Tout est dans le style. Loti est un grand écrivain, un formidable passeur d'émotions ! », s'émerveille-t-il encore. Non seulement, Serge Le Quéau a lu tous les livres de et sur Pierre Loti mais de Rochefort à Hendaye, de Paimpol à Istanbul, il a parcouru tous les lieux qui ont marqué la vie de l'écrivain. Considéré aujourd'hui comme un grand connaisseur de l'oeuvre et de l'homme (« Dans les colloques, on me prend pour un universitaire ! », s'amuse l'ancien postier, pilier de Sud-PTT), il a fondé, en 2010, l'association Pierre-Loti. Objectif principal mais non unique : réactiver le projet de monument, initialement voulu par Armand Dayot, inspecteur général des Beaux-Arts natif de Paimpol.
Une souscription fut lancée et, aujourd'hui, le budget (63.000 €) est presque bouclé.
Séduite par le projet, une riche héritière y a participé pour près de la moitié (28.200 €). « Somme largement défiscalisable », n'oublie pas de préciser le militant d'Attac. Dans deux mois si tout va bien... 160 donateurs, dont plusieurs collectivités, ont également mis la main à la poche. L'oeuvre prend forme à Plérin, dans l'atelier de Charly Sallé, sculpteur classé parmi les meilleurs ouvriers de France, sélectionné par un jury. Un bloc de beau granit clair de Pleumeur-Bodou (dix tonnes !) s'anime peu à peu sous le pistolet pneumatique et le burin de l'homme de l'art. Dans deux mois, en hommage aux marins de la Grande pêche, au sculpteur briochin injustement oublié et à l'écrivain qui a fait beaucoup pour la renommée de Paimpol, la double silhouette s'installera sur le terre-plein du port. Gaud et Moan fixeront du regard, pour l'éternité, cette mer cruelle qui leur a volé leurs hommes...
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