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12/12/2014

Urbanisme, la responsabilité personnelle d'un Maire !

Avant 1983, la responsabilité en matière d'urbanisme relevait de l'Etat !

La Faute sur mer.jpg

La décentralisation de Gaston Deferre a transféré ce pouvoir "régalien" de l'Etat aux communes, avec l'idée première de rapprocher les décisions des propriétaires locaux !

Cette réforme a permis un "foisonnement" de la construction à travers toute la France, à la suite de l'allégement du contrôle préfectoral ! (5% environ des dossiers transmis !). Le POS, par son zonage détaillé, devait "interdire" certaines zones à la construction...mais la tentation est grande de passer d'un terrain, dit agricole, vers un terrain constructible à fort potentiel financier !

Les avalanches de Chamonix, celles de Tignes Val d'Isère ont rappelé aux futurs constructeurs, que le danger d'occuper des couloirs d'avalanche est réel !

La tempête Xynthia, les inondations du Sud-Est indiquent que le risque d'inondation de zones de construction "sensibles" est mortel !

A Saint Pierre Quiberon, les tempêtes 2013/2014 ravagent un peu plus les défenses maritimes de l'isthme, en mettant en danger les infrastructures (Fluides, voie ferrée, électricité) et les habitants de Penthièvre...

Et pourtant, ici aussi, les droits à construire ont été distribués au début du siècle passé à des lotisseurs aux dents longues. L'affiche, qui trône encore en salle du Conseil, met seulement en avant les bois et les plages de sable fin...

Devant le scandale national de la construction-spéculation, les Préfets (donc l'Etat) établissent les Plans de prévention des risques (inondation, éboulement...), qui redonnent à l'Etat le pouvoir d'autoriser. Le feu rouge est allumé, mais les inconscients manifestent toujours (à Carnac, près de chez nous !).

Aujourd'hui, dans les communes maritimes, les défenses, à la charge de l'Etat, sont abandonnées, le Maire "local" étant chargé d'être Maître d'œuvre de leur réhabilitation...

Etat, responsable, mais pas coupable ? 

 


 

Xynthia, l'ancien maire de La Faute-sur-Mer condamné à quatre ans de prison ferme

 

LE MONDE du 12 décembre 2014

 

Pascale Robert-Diard

 

 

Le tribunal correctionnel des Sables-d’Olonne a condamné, vendredi 12 décembre, l’ancien maire de La Faute-sur-mer René Marratier à quatre ans de prison ferme pour homicides involontaires et mises en danger de la vie d’autrui. Il a également prononcé une peine de deux ans contre son ex-première adjointe et présidente de la commission d’urbanisme, Françoise Babin.

 

Dans son jugement de 130 pages, le tribunal considère que « les conséquences de Xynthia ne doivent rien au hasard ». « Cette affaire ne peut se réduire à la question de l’urbanisation en zone inondable. Le risque était connu. Les permis de construire accordés par René Marratier et Françoise Babin sont à l’origine directe de neuf décès. Ce dossier est l’histoire de la captation d’une information vitale et du piège qui s’est refermé sur les victimes », ont expliqué les juges. « Le désir de rivage n’explique pas tout. Les victimes ne portent aucune part de responsabilité », ajoute le tribunal, en relevant que la confiance qu’elles avaient dans leurs élus a été trahie.

 

Lire la motivation du jugement qui accable l’ancien maire de La Faute-sur-Mer

 

« René Marratier n’a pas pris les mesures pour éviter les conséquences désastreuses de la tempête Xynthia. Il était un maire très expérimenté, il n’a utilisé aucune de ses prérogatives en matière de sécurité. Il n’aura en réalité de cesse de contester leurs existences et d’ignorer les consignes de sécurité », poursuit le jugement. Le jour de la tempête, il a passé une « journée absolument ordinaire sans se préoccuper le moins du monde des alertes » qui avaient été transmises.

 

Le tribunal estime que le comportement de René Marratier constitue une « faute caractérisée » et « détachable du service », ce qui le rend responsable, sur ses deniers personnels, de l’indemnisation des dommages des victimes. La même analyse vaut pour son adjointe Françoise Babin. Les juges relèvent au passage que l’ex-présidente de la commission d’urbanisme n’a pas « voulu compromettre la vente de lots dont elle était propriétaire ». Les juges ont aussi relevé plusieurs « manquements de l’Etat » et souligné que la faute « la plus grave » a été de rendre cette zone de La Faute-sur-Mer constructible.

 

La peine prononcée contre l'ex-maire est supérieure à celle demandée, mercredi 15 octobre, par le procureur de la République Gilbert Lafaye, qui avait requis quatre ans d’emprisonnement dont trois ferme et 30 000 euros d’amende contre René Marratier, et trois ans dont deux ferme et 50 000 euros d’amende contre Françoise Babin. A l’ancien maire, le procureur avait reproché des « manquements grossiers » à ses devoirs d’élu chargé de la sécurité de ses concitoyens, et dénoncé « la frénésie immobilière » de la commune de La Faute-sur-Mer.

 

DEUX MONDES OPPOSÉS

 

« Quand on exerce depuis quatre mandats, on ne peut s’abriter derrière son incompétence et son ignorance du risque », avait observé le procureur, en soutenant que René Marratier était coupable d’une faute « personnelle » et non pas d’une faute de service, ce qui le rendait responsable sur ses deniers des dommages et intérêts réclamés par les parties civiles. Ce jugement, d’une sévérité inédite pour les deux élus – la défense de René Marratier avait rappelé que la peine la plus lourde prononcée contre un maire pour homicide involontaire est de dix mois d’emprisonnement avec sursis – est à l’image des débats qui se sont tenus du 15 septembre au 17 octobre devant le tribunal correctionnel des Sables-d’Olonne.

 

Ils ont opposé deux mondes qui ne se comprennent plus. D’un côté, près de 120 parties civiles qui attendaient de la justice qu’elle leur explique pourquoi, comment et surtout à cause de qui le passage de la tempête Xynthia sur les côtes vendéennes dans la nuit du 27 au 28 février 2010 s’est transformé en tragédie, tuant 29 personnes, des enfants, des parents, des grands-parents âgés de 3 à 87 ans, prisonniers de la montée des eaux dans leur pavillon en bord de mer.

 

« EN FRANCE, LE RISQUE S’OUBLIE »

 

De l’autre, un maire comme étranger à son propre procès, resté obstinément attaché à l’image de héros bâtisseur qui lui a valu d’être élu et réélu sans discontinuer à la tête de sa petite commune touristique de Vendée. Les premiers avaient besoin de trouver un coupable au drame qu’ils ont vécu, le second refusait d’endosser une responsabilité qui l’écrase. Cette responsabilité, René Marratier la refuse d’autant plus que, dans ce dossier, l’Etat a été épargné en dépit des multiples « dysfonctionnements » des services de la préfecture et de la direction départementale de l’équipement relevés par l’enquête, depuis la décision de rendre constructible la zone inondable de La Faute-sur-Mer jusqu’aux avis favorables donnés à des permis de construire qui ne respectaient pas les normes de sécurité.

 

« En condamnant René Marratier, vous condamnerez tous les maires de France », avait observé dans sa plaidoirie l’un des avocats de la défense, Didier Seban. En ce sens, ce procès a aussi été celui de la décentralisation, révélant la faiblesse de l’Etat face à des élus locaux devenus tout puissants. Comme l’avait rappelé, à l’audience, Thierry Lataste, ancien préfet de Vendée et actuel directeur de cabinet du ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve,« en France, le risque s’oublie, le risque se néglige, et la trace des catastrophes s’efface vite et les représentants des services de l’Etat sont perçus comme venant de l’extérieur, n’ayant aucune connaissance de la réalité communale dont seuls les élus seraient détenteurs. »

 

Ces cinq semaines d'audience ont surtout illustré les difficultés que posent à la justice ces dossiers de catastrophes environnementales ou de santé publique dans lesquels figurent de très nombreuses parties civiles. Le danger guette à chacun de ces procès de voir les victimes exiger des juges une reconnaissance de leur souffrance sans commune mesure avec les délits involontaires reprochés aux prévenus. Et de nourrir, chez les prévenus, le sentiment qu'ils sont moins condamnés pour ce qu'ils ont fait – ou mal fait – que parce qu'il faut livrer un coupable au besoin de vengeance des victimes.

 


En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/12/12/xynthia-l-ancien-maire-de-la-faute-sur-mer-condamne-a-quatre-ans-de-prison-ferme_4539436_3244.html#kS5sY74kHALeVRuz.99

 

 

Permis de construire, l'Etat se désengage

 

Télégramme du 12 décembre 2014

 

 René Perez

 

 

 

 

29 personnes ont péri lors du passage de la tempête Xynthia.

 

 En juillet, l'État n'instruira plus les permis de construire pour les petites communes. Une nouvelle charge pour elles. Mais aussi une interrogation sur le pouvoir personnel des maires alors que va être rendu, aujourd'hui, le jugement sur le drame de La Faute-sur-Mer, en Vendée, qui avait fait 29 morts.

 

 Pourquoi les communes coûtent-elles si cher au budget de la Nation ?

 

 Il est d'usage de pointer les investissements somptuaires ou bâtiments surdimensionnés. Mais au fil du temps, ce sont souvent les dépenses structurelles qui ont alourdi le budget des communes et en premier lieu, les charges liées à l'urbanisme. En transférant aux communes les permis de construire, en 1983, l'État leur a fait un coûteux cadeau. Et les règles qui s'appliqueront à partir de juillet 2015 ne vont pas alléger la charge.

 

 Des services à créer

 

 Avant 1983, c'est l'État qui gérait l'urbanisme et instruisait les permis. Avec la décentralisation, les maires ont été investis d'un pouvoir dont ils ont parfois usé sans discernement (lire ci-dessous). Mais en transférant l'urbanisme, l'État a aussi contribué à plomber le budget des communes qui ont été nombreuses à créer des services d'instruction des permis sans vraiment chercher la voie de la mutualisation des coûts. Le résultat est aujourd'hui difficilement chiffrable mais si l'on prend l'exemple du Finistère, une trentaine de communes du département ont leur propre service d'instruction des permis, comptant généralement plusieurs agents. Dans les années fastes, certaines communes littorales délivrent plusieurs centaines de permis par an, ce qui nécessite un service d'urbanisme pesant de plus en plus lourdement sur le budget des communes sans compensation équivalente de l'État.

 

 Les petites communes échappaient jusqu'à présent au poids de l'instruction mais, à leur tour, elles vont devoir y passer.

 

 La nouvelle loi stipule qu'à partir de juillet 2015, l'État n'instruira plus les dossiers gratuitement, sauf pour les communes relevant d'intercommunalités de moins de 10.000 habitants. Quand on sait que dans le même temps, l'État pousse à la constitution d'intercommunalités d'au moins 20.000 habitants, on mesure la portée du sursis.

 

Des agents d'État vers les communes

 

 Selon une enquête de l'Association des maires de France, un quart des élus ruraux interrogés en septembre dernier ignoraient ces nouvelles dispositions ou ne s'en étaient pas préoccupés. Il va pourtant falloir s'y mettre très vite. Un exemple : l'intercommunalité Arc Sud Bretagne, un peu en avance sur son temps puisqu'elle résulte de la fusion de deux communautés de communes. Autour de Muzillac (Morbihan), douze communes se sont fédérées, totalisant 25.000 habitants, et elles ont entrepris les démarches pour créer leur propre service d'instruction des permis. André Pajolec, président d'Arc Sud Bretagne, et ses adjoints, se sont penchés sur la question. En appliquant un ratio pour chaque acte d'urbanisme (et il n'y a pas que les permis de construire), il estime que ce service devra compter trois ou quatre agents pour un coût oscillant dans une fourchette de 120.000 à 160.000 euros par an. « Et sans compensation de l'État », précise-t-il dans la foulée.

 

 Avec ce transfert, l'État ne devrait pas pour autant se trouver confronté aux affres du sureffectif.

 

 Car les communautés ainsi contraintes au recrutement se tournent en priorité vers des agents d'État qui connaissent déjà tous les arcanes de l'urbanisme. Et naturellement, l'État est prêt à faire des efforts pour faciliter le détachement de ses agents, qu'il soit provisoire ou définitif, pour qu'ils intègrent l'administration territoriale. C'est donc tout bénéfice pour lui, alors que la charge s'alourdit pour les communes qui doivent aussi faire face aux conséquences contentieuses d'une réglementation fluctuante. À elle seule, la loi Littoral est une vraie pompe à finances communales. Trébeurden en sait quelque chose : elle a récemment été condamnée à verser 58.164 euros et 35.390 euros à deux propriétaires pour avoir délivré des permis non conformes à cette loi. Ça fait cher au kilo !

 

 En complément

 

 La Faute-sur-Mer et le pouvoir des maires

 

 « J'espère qu'il n'y aura pas d'inondations sinon on nous traitera d'assassins. » La scène se passe en 2009 dans le bureau de la sous-préfète des Sables-d'Olonne, Béatrice Lagarde, qui, quelques années plus tard, sera en poste à Brest. Face à elle, le maire de la Faute-sur-Mer, René Marattier, contre lequel elle s'emporte car après avoir attribué des permis de construire en zone inondable, il traîne les pieds pour faire établir un plan de prévention des risques et s'oppose à la fermeture du camping municipal situé sous le niveau des eaux. Le différend musclé entre l'État et le maire sera fracassé, quelques mois plus tard, par la tempête Xynthia et ses 29 morts à La Faute-sur-Mer. Le jugement du procès qui s'est tenu en octobre sera rendu aujourd'hui.

 

 Un frein au pouvoir personnel

 

 Ce procès a jeté une lumière crue sur les pouvoirs personnels attribués aux maires depuis les lois de décentralisation. Et il a prouvé à quel point la personnalisation du pouvoir était poussée dans cette commune. Ce risque devrait peu à peu être atténué car la réforme territoriale et toutes les mesures qui la précèdent déjà plaident en faveur d'une instruction collective des permis de construire.

 

D'abord parce que les plans locaux d'urbanisme se font déjà, le plus souvent, au niveau des intercommunalités et non plus des communes, tant les territoires sont aujourd'hui enchevêtrés les uns aux autres. L'exemple de Arc Sud Bretagne (lire ci-dessus) est là également pour montrer qu'avec la fin de l'instruction des permis par l'État, les communes rurales n'ont pas d'autre choix que de monter des services d'instruction intercommunaux.

 

 Deux éléments qui consacrent l'intercommunalité et concourent à donner à l'urbanisme une véritable dimension collective en diminuant le pouvoir personnel des maires. Et donc les risques de connaître d'autres drames comme celui de La Faute-sur-Mer à l'issue duquel on saura, aujourd'hui, si les élus sont les seuls à porter le chapeau ou si la faute de l'État est elle aussi constituée.

 

Contre les recours abusifs

 

Depuis des années, les permis de construire font régulièrement l'objet de recours devant le tribunal administratif et la Bretagne n'a pas échappé à certaines dérives. En l'occurrence, les contentieux entamés sous les prétextes les plus divers par des particuliers ou associations, utilisant tous les recours pour forcer la collectivité ou le promoteur à faire le choix de l'accord à l'amiable, avec versement d'une indemnité s'apparentant à une véritable rançon. L'an dernier, une ordonnance a enfin été prise pour lutter contre ces recours abusifs, imposant au requérant un véritable « intérêt à agir » et se doublant de dispositions fiscales. Du côté du tribunal administratif de Rennes, on indique que cette ordonnance a une portée dissuasive mais qu'il est encore trop tôt pour en mesurer les effets réels et les possibles échappatoires. (Photo Claude Prigent)

© Le Télégramme - Plus d’information sur http://www.letelegramme.fr/bretagne/communes-tres-cher-urbanisme-12-12-2014-10458439.php

 

 

 

 

 

 

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