15/06/2014
2 kilomètres jusqu'au répartiteur...
Le choix de l'investissement en télécommunication est "fondamental" !
La pose de fibre optique jusqu'au client final coûterait environ 30 milliards d'euros en France ! Ni l'Etat, ni les opérateurs (Orange, SFR, Bouygues et Free) n'ont les moyens d'investir une telle somme dans les réseaux !
Aujourd'hui l'alternative "radio" (4G) ne permet pas d'assurer, seule, les débits des connexions fixes... et pourtant elle serait moins coûteuse (27.000 pylônes environ)... d'où cette guerre picrocholine entre les 4 opérateurs et l'intervention maladroite de l'Etat...
Le bon Docteur Cioffi propose de prolonger l'ADSL sur cuivre par le VDSL (mes petits brevets, qui rapportent !) et ajoute la cerise sur le gâteau, l'utilisation des sous-répartiteur, alimentés par la fibre. Exactement le même schéma topologique que celui de la téléphonie mobile !
La "convergence" est possible, si la guerre des chefs se termine par un bon calumet de la paix !
Dr John Cioffi, le cuivre sera encore là dans cent ans
Les Echos du 4 juin 2014
Solveig Godeluck
John Cioffi, qui a commencé sa carrière comme ingénieur aux Bell Labs d’ATT, a créé sa première start-up en 1989. C’est là qu’il a mis au point un procédé permettant de faire passer de la vidéo sur les lignes téléphoniques : c’est le DSL (Digital Subscriber Line), qui permet aujourd’hui à des millions de Français de bénéficier du triple play ADSL. Il ne touche plus de royalties sur cette technologie qui dope le cuivre, mais il a déposé des brevets sur son successeur, le VDSL. Les opérateurs français le déploient depuis octobre. L’américain marié à une française a nommé son entreprise Assia, comme le prénom de sa femme. SFR et Bouygues Telecom sont ses clients.
Votre société Assia promet d’améliorer la connexion Internet des foyers connectés par la ligne téléphonique. La qualité ne va pas de soi dans l’accès fixe ?
Ce qui fait la qualité d’une connexion, ce n’est pas juste la vitesse, c’est aussi la constance du débit, la définition de la vidéo, etc. Il y a tant de variables à prendre en compte que chaque connexion est unique. Les causes d’interférences sont multiples. Un sèche-cheveux peut ralentir voire couper votre accès Internet fixe. Dans mon pied-à-terre parisien, je suis aussi en concurrence avec mes voisins pour les ressources Wi-Fi. C’est pourquoi les opérateurs ont constamment besoin de surveiller leur réseau et d’apporter des améliorations.
Auprès de qui vendez-vous votre suivi qualité ?
Nous surveillons la performance de réseaux totalisant 70 millions clients pour le compte des opérateurs télécoms partout dans le monde, dont 6 millions en France. Nous avons 90 % de part de marché aux Etats-Unis, mais seulement 20 % en Europe. Grâce à nos prestations, BSkyB recense un tiers de plaintes de moins que ses concurrents au Royaume-Uni. Nous venons également de créer une application mobile, Cloudcheck, qui permet à tout un chacun de nous signaler une connexion dégradée de la ligne fixe ou bien du Wifi. Cela nous permettra de commercialiser des données sur l’état du réseau auprès des opérateurs, mais aussi de fabricants de composants électroniques voire d’entreprises de type Google ou Netflix.
Le déploiement de la fibre optique ne va-t-il pas régler les problèmes de qualité dans le fixe ?
En France, j’ai une connexion en fibre optique. Mais comme il s’agit d’un réseau partagé (PON), en tout cas partagé plus en amont que le réseau DSL, la qualité est souvent mauvaise. Le soir quand les enfants se branchent sur YouTube sur leur tablette, quand les voisins regardent la télévision ou jouent à des jeux en ligne, ils créent des embouteillages. Entre 19 heures et 22 heures, mon débit peut tomber à 2 ou 3 mégabits par seconde contre 70 mégabits par seconde en temps normal.
Pensez-vous que 100 % des Français seront connectés au très haut débit en 2022, dont 80 % en fibre optique, comme le gouvernement l’espère ?
Il faut être réaliste. En privé, tous les dirigeants des opérateurs télécoms français disent qu’ils ne savent pas où trouver l’argent. Ce plan va coûter entre 20 et 30 milliards d’euros. Pour poser la fibre optique, il faut creuser, et un kilomètre coûte en moyenne un million d’euros. Pour équiper 10.000 personnes, c’est merveilleux. Mais s’il n’y a que dix foyers abonnés, c’est effrayant. N’oubliez jamais que la fibre, c’est du BTP, pas de l’électronique. Aux Etats-Unis, Verizon avait décidé de déployer la fibre à grande échelle. Ils ont dépensé 20 milliards de dollars, puis ils ont mis fin à l’initiative en 2011, avec une perte non récupérable de 800 dollars par foyer connecté. Quant aux Australiens, quand ils ont réalisé que le projet de réseau national en fibre optique impliquait des forfaits minimum de 200 dollars australiens par mois (135 euros), ils ont décidé de passer au VDSL.
Mais si l’on se contente d’améliorer les lignes de cuivre existantes, on ne pourra pas faire croître les débits...
Avec le G.Fast, une technologie DSL, on sait déjà dépasser le gigabit par seconde. C’est juste une histoire de longueur de ligne. Théoriquement, on pourrait même faire du 100 Gbps sur 30 mètres, mais à un certain point la limite n’est plus le cuivre : c’est le silicium dans les puces. Bien sûr, si on pouvait revenir 120 ans en arrière, on poserait de la fibre ! Mais je crois que le cuivre sera encore là dans 100 ans. J’ai commencé dans ce métier il y a un quart de siècle ,et chaque année on m’a prédit son extinction. Cela ne s’est jamais produit.
Dans le très haut débit, l’Europe est-elle en retard sur les Etats-Unis ?
Je ne suis pas de cet avis. On oublie de comptabiliser les 50 millions d’Américains qui sont trop pauvres pour avoir une connexion et qui se connectent dans les bibliothèques. Il y a parfois un tel afflux dans ces lieux publics que le débit peut tomber à quelques kilobits par seconde. La situation américaine est donc très contrastée, mais cela ne se voit pas dans les statistiques. De plus le pays est grand, difficile à raccorder, alors qu’en Europe, vos lignes téléphoniques sont plus courtes, en moyenne 2 kilomètres jusqu’au répartiteur. Cela permet d’assurer de meilleurs débits.
Précision de la part de John Cioffi.
Suite à la parution de l’article, une controverse est apparue sur Twitter concernant le coût du déploiement de la fibre. John Cioffi a accepté de détailler sa réponse.
What I told Solveig is that the cost of laying 1 km of fiber can be anywhere from a few 10’s of thousands of dollars/euros to 1 million euros depending on the obstacles that are in the path. Digging up streets, and putting it under ground (an aesthetic requirement in many places) can get expensive in terms of time, labor, and permits. Going through walls in buildings can also get quite expensive. On the other hand if it is just digging through grass in an open field, it can be cheaper, and as well if hanging from existing telephone poles, it can be cheaper than the digging. Paris and some large cities have sewer systems that can reduce the costs of underground fiber, but it still is selective in deployment.
Thus, people like to quote only the cheapest cost, and not the maximum cost. As I told her the average across most of a nation gets into a few thousand dollars per customer. The German numbers from Deutsche Telekom (not quoted, but she wrote them down) were 80 billion euros to deploy the entire country of 24 million lines. She claimed they were more distributed in population, which is true. However, 30 billion euros for France is probably a very aggressive (on the cheap side) estimate. That figures to at least 2000 dollars per customer. The kilometer of fiber is headed towards 500 customers, then that is 1 million dollars.
Fiber proponents know that a few thousand dollars per customer is not a viable case, and they try hard to say it costs less. However, the last 30 years plus of slow fiber deployment have proven otherwise.
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