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21/05/2014

Tirs au but ? A-t-on les moyens d'une expérimentation industrielle ?

La Force stratégique repose sur le "vecteur" M51, dont les premiers essais à la mer sont insuffisants !

SNLE du Type Le Triomphant.jpg

La qualification technique d'un produit industriel complexe (comme le lanceur M51) est une opération fondamentale, surtout lorsque le lanceur fait partie de la panoplie nucléaire, avec un tir au but obligatoire...

Les Russes enchainent échec sur échec avec leur lanceur "Proton", ce qui peut inquiéter les occidentaux sur la qualité des tirs nucléaires russes, depuis leur flotte sous-marine !

Le "M51" remplace aujourd'hui le vieillissant "M45" sur deux SNLE sur 4...

La chaîne industrielle des sous-traitants est "sous pression" !


Penmarc'h, nouvelles précisions sur l'échec du tir de missile M51
Télégramme du 20 mai 2014

Nous vous parlions la semaine dernière des premières explications "officielles" données sur l'échec du tir de missile M51 en mai 2013 au large de Penmarc'h. Nos confrères de Mer et Marine apportent quelques précisions passionnantes pour les plus curieux.


Qu'en est-il des résultats de l'enquête technique lancée par la Direction générale de l'armement suite à l'échec du tir d'un missile M51, réalisé le 5 mai 2013 depuis le sous-marin nucléaire lanceur d'engins Le Vigilant ?

Le sujet demeure extrêmement sensible et les causes précises de cet incident n'ont pas été rendues publiques en raison de la confidentialité qui entoure les forces nucléaires françaises. Lors de son audition devant la Commission de la défense de l'Assemblée nationale, le 30 avril, le Délégué général pour l'armement a, néanmoins, donné quelques explications aux députés, qui l'interrogeaient sur la dissuasion nucléaire.

Laurent Collet-Billon pointe en premier lieu des problèmes d'ingénierie : « La réappropriation des capacités d'ingénierie des systèmes complexes est l'une des préoccupations de la DGA. Après l'échec, en mai 2013, du sixième tir expérimental du missile M51, nous avons demandé aux services concernés d'Airbus Defence & Space des efforts accrus tant en matière d'ingénierie qu'en maîtrise de la qualité et de leurs sous-traitants. Ces faiblesses, que nos propres services « qualité » ont constatées, doivent impérativement être corrigées (?) S'agissant de la maîtrise de l'ingénierie système, je me rends compte que, DGA exceptée, peu nombreux sont ceux qui maîtrisent la technique du missile balistique ; ce n'est pas sans poser problème. Les enquêteurs chevronnés qui ont analysé les causes de l'échec du tir d'essai de mai 2013 appellent à des efforts, à la fois dans le management et dans l'attention portée aux outils d'ingénierie système. Seule l'ingénierie système et ses outils informatiques associés nous permettront de gérer la complexité des interfaces et des évolutions successive des équipements, et d'assurer la démonstration de la sûreté nucléaire », affirme le DGA, qui note au passage que cette question cruciale intéresse aussi le domaine civil, « le fabricant du M51 étant aussi le constructeur des fusées Ariane ».

Veiller à ne pas « étrangler » les fournisseurs
Maître d'oeuvre du programme M51, Astrium (désormais intégré à Airbus Defense & Space), mais aussi les grandes sociétés qui coopèrent avec lui, comme Herakles (Safran), travaillent avec de nombreux sous-traitants. Des fournisseurs « étroitement surveillés, répertoriés et suivis » auxquels s'intéresse également la DGA : « Le rôle de la DGA est de vérifier que les maîtres d'oeuvre n'imposent pas à ces PME des contrats qui les étrangleraient, notamment financièrement. Nous donnons aux maîtres d'?uvre une visibilité à l'horizon 2030 et au-delà ; nous voulons qu'ils procèdent de la même manière, dans une parfaite transparence, avec les entreprises sous-traitantes », explique Laurent Collet-Billon, qui rappelle que le Pacte Défense PME, souhaité pat Jean-Yves Le Drian, a été mis en place dans cette perspective.

En cette période de restrictions budgétaires et de course aux économies, où la tentation est grande de compenser ici et là les manques à gagner, de sérieuses questions se posent quant au maintien, voire à l'éventuel renforcement, de l'effort consenti dans le domaine de la dissuasion nucléaire. Une activité stratégique pour laquelle la France ne peut se permettre de laisser des économies de bout de chandelle mettre à mal la crédibilité de son « assurance vie », comme les politiques aiment qualifier cet outil militaire. On notera à ce propos que l'effort budgétaire en faveur de la dissuasion n'a cessé de baisser depuis 1967, passant selon les chiffres du DGA de 1% du produit intérieur brut à cette époque à 0.47% en 1990 et seulement 0.17% en 2013. Cela, alors que l'effort global au profit de la défense passant de 4% du PIB en 1967 à 3% en 1990, pour tomber à 1.5% en 2013.

Dans l'attente des prochains tirs

Pour mémoire, le programme M51, qui s'élève à 8.5 milliards d'euros, vise à remplacer le missile M45 opérationnel depuis l'entrée en flotte du SNLE Le Triomphant, en 1997. Mis en service en 2010 avec Le Terrible, quatrième et dernier sous-marin de cette classe, la nouvelle arme équipe après refonte les trois premiers bâtiments de la série. D'abord Le Vigilant, remis en service l'an dernier après 30 mois de travaux, puis Le Triomphant, actuellement en chantier et dont le retour à la mer est prévu en 2015, année où débutera la conversion du Téméraire.

Depuis l'échec de mai 2013, aucun autre tir d'essai de M51 n'est intervenu. Pour autant, les deux SNLE équipés de ce missile ont poursuivi leur cycle de patrouille afin d'assurer la permanence d'au moins un SNLE à la mer. Au lendemain de l'incident, le ministère de la Défense avait, en effet, affirmé qu'il ne remettait pas en cause la crédibilité de la dissuasion nucléaire française. Cinq tirs avaient été menés précédemment avec succès, soit quatre depuis la terre et un en immersion depuis Le Terrible. Chaque sous-marin étant équipé de 16 missiles, il n'y a donc aucune raison de douter que les SNLE français ne soient pas en mesure d'atomiser tout ennemi s'en prenant aux intérêts vitaux du pays. Cela dit, il est vrai que les propos rassurants du ministère reposent sur des faits concrets limités, du fait de l'évidente nécessité de maintenir le secret autour de ces armes. Etant entendu que les résultats précis de l'enquête ne peuvent probablement être rendus publics pour des questions de sécurité, il reste pour le moment l'image d'un missile se désintégrant dans le ciel, au large des côtes bretonnes. Par conséquent, pour que tout soupçon ou doute soit définitivement levé auprès des non-initiés mais aussi d'autres pays, il faudra attendre que de nouveaux tirs d'essai de M51 soient réalisés avec succès. Une grosse pression pour les militaires et les industriels, qui n'auront évidemment pas le droit à l'erreur. Question de crédibilité.

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