05/12/2015
3 heures ?
La LGV ne permet pas en 2017 d'atteindre Brest ou Quimper en 3 heures...
Il faudra certainement plus de 3 heures 30 minutes en 2017 pour relier le bout de la pointe bretonne à la capitale.
Le progrès des transports s'arrête donc à Rennes, la capitale régionale.
Au delà, les passages à niveau dangereux seront éliminés petit à petit !
La distorsion de développement en Bretagne risque donc de s'accentuer !
Régionales, la LGV fait toujours débat
Télégramme du 1er décembre 2015
Yvon Corre
En 2017, les TGV au départ de Brest et Quimper mettront en moyenne 3 h 30 pour rejoindre Paris. On est encore loin des trois heures que l'on a promises aux Bretons.
1998, 2004, 2010, 2015... Les élections régionales défilent et le TGV continue à s'inviter dans la campagne. En 2017, une première étape importante sera franchie avec la mise en service de la LGV Le Mans-Rennes mais le compte y est-il ? Pas vraiment. Trente minutes restent encore à gagner pour atteindre ces fameuses trois heures.
En 2017, les TGV au départ de Brest et Quimper mettront en moyenne 3 h 30 pour rejoindre Paris. Grâce à la ligne nouvelle entre Le Mans et Rennes, ce sera 45 minutes de moins qu'aujourd'hui. Ce n'est pas rien mais on est encore loin des trois heures que l'on promettait aux Bretons de la pointe ouest au début des années 2000 pour... 2012.
Des milieux économiques frustrés
Alors forcément, il y a comme une légère frustration chez tous ceux qui misaient beaucoup sur un vrai TGV. C'est le cas dans les milieux économiques. « On est quand même loin des trois heures », déplore Yann Halna du Fretay, le secrétaire général du Medef Finistère. « Il y avait un vrai sens à pouvoir faire l'aller-retour dans la journée à un prix et dans un temps raisonnables. Certes, le vendredi soir, un train drapeau, comme on dit, fera le trajet en 3 h 15. Mais ce n'est pas ça qui fera qu'une entreprise viendra s'implanter à la pointe bretonne. Les acteurs économiques rennais seront à 1 h 27 de Paris. Pourquoi voulez-vous qu'ils se battent pour la pointe bretonne ? ». Pour l'association Investir en Finistère, le compte n'y est pas non plus. « 2017 sera une avancée mais ce n'est pas suffisant. C'est une première étape mais seulement une première étape. Brest et Quimper seront toujours à deux heures de Rennes », observe Françoise Lelann, la directrice, pour qui les trois heures doivent rester un objectif important.
Temps maximisé
Chargé des transports à la Région, Gérard Lahellec comprend d'une certaine manière cette déception : « Ça ne fait pas encore trois heures. Ça reste l'objectif mais il y a encore beaucoup à faire », reconnaît-il. Les quelque 400 millions dépensés sur les axes Rennes-Brest et Rennes-Quimper pour les moderniser et supprimer 47 passages à niveau n'ont permis de gagner que dix minutes. Mais Gérard Lahellec veut aussi rappeler qu'en 2017 l'offre ferroviaire augmentera globalement de 20 % en Bretagne, avec quatre TGV supplémentaires. Il conteste, par ailleurs, que le gagnant soit Rennes et le perdant la pointe bretonne. « Non seulement, on augmente le nombre de TGV qui desserviront le Finistère mais on maximise les gains de temps pour ceux qui sont le plus loin. Ce sont les TGV qui desserviront Rennes qui feront les dessertes du Mans et de Laval. Ce qui veut dire que l'on fait perdre du temps à ceux qui sont le plus près. C'est le contraire des règles du marché ». Et à ceux qui pourraient considérer que la Bretagne n'aurait pas été bien traitée par rapport aux autres régions, Gérard Lahellec rappelle que le CIADT (Comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire) de 2003 avait relégué le projet breton derrière tous les autres. « Ça ne va certes jamais assez vite mais on a réussi à déjouer les calendriers. On arrive finalement un peu devant Bordeaux ».
À quand les trois heures ?
Dans quel délai les trois heures ? Difficile aujourd'hui d'avancer une date. De nouvelles études ont été lancées. Les débats sont toujours en cours. Faut-il, par exemple, un direct Rennes-Lamballe ? Il ne s'agit pas de faire une nouvelle LGV mais des aménagements qui devront permettre aux trains de rouler à au moins 220 km/h tout du long. Travaux dont le coût est estimé, au bas mot, à trois milliards d'euros. Considérant que la Bretagne avait été jusqu'à présent plutôt privilégiée, le rapport Duron a recommandé de repousser à 2025 cette nouvelle étape. Mais rien n'oblige la Région à attendre cette échéance. « Si la Bretagne se mobilise, on devrait pouvoir atteindre plus de la moitié de l'objectif avant cette date », assure Gérard Lahellec. Mais d'ici là, il faudra que la Bretagne, et en particulier la pointe bretonne, obtienne que les liaisons Rennes-Quimper et Rennes-Brest soient réalisées en même temps que Rennes-Nantes. Ce qui est loin d'être acquis. « Il faut rapprocher la pointe bretonne de Rennes en même temps que l'on rapproche Nantes de Rennes », souligne Gérard Lahellec, qui ne cache pas que c'est la grande question qui se pose pour la prochaine majorité régionale.
En complément
Les trois heures : tous ne sont pas d'accord
Contrairement à une idée reçue l'objectif de mettre Quimper et Brest à trois heures de Paris n'est pas un objectif partagé par tous les Bretons. En tout cas, pas par l'ensemble des formations politiques. Sur cette question, il n'y a pas d'union sacrée. Même si elles sont minoritaires, des voix discordantes se font entendre.
Un investissement trop important
C'est le cas chez les écologistes. Pour la liste « Une autre voie pour la Bretagne », conduite par René Louail, « l'investissement pour la LGV pénalise non seulement les transports du quotidien mais aussi les autres politiques régionales. Deux kilomètres de LGV, c'est un lycée neuf ». La liste « Bretagne en luttes », menée par Gaël Roblin, réclame, quant à elle, l'annulation pure et simple des subventions à la LGV. Un argent qui devrait, selon elle, être consacré à la rénovation des lignes TER et aux gares. Du côté du Front national, les trois heures ne sont pas non plus une priorité. « Je ne vois pas ce que cela va apporter à Brest. Il faut mettre le paquet sur le réseau secondaire qui a été abandonné », souligne Gilles Pennelle, son leader breton. Ce que conteste Gérard Lahellec, chargé des transports au sein de la majorité sortante, qui assure, qu'entre 2007 et 2017, « on a mis deux fois plus d'argent pour la desserte des territoires et les transports au quotidien que pour le TGV ».
« Pas au détriment du reste »
Pas opposé à l'objectif des trois heures, Xavier Compain, tête de liste du Front de gauche, estime, cependant, qu'il ne doit pas être atteint « au détriment du reste ». « Le TGV est une belle vitrine mais il serait peut-être pertinent de remettre en service certaines lignes comme Saint-Brieuc - Vannes ou Rennes-Fougères ».
« Les trois heures sont indispensables »
Christian Troadec (« Oui la Bretagne ») est, lui, résolument favorable aux trois heures car sinon « on pénalise le monde économique ». Pour le financement, il propose de renégocier le tour de table avec l'État. « La ligne Lyon-Turin ne coûtera pas un sou aux collectivités locales », rappelle-t-il. Il propose également la création de lignes nord-sud. Pour Marc Le Fur (« Le choix de la Bretagne »), les trois heures « sont absolument indispensables ». « On ne va pas faire une LGV tout du long mais il faut des aménagements très sensibles ». Et le financement ? « Il doit d'abord être un financement d'État. Pourquoi il y aurait de l'argent pour Dax et pas pour nous ? ».
La LGV en quelques dates
Octobre 2007. Déclaration d'utilité publique. De 2008 à 2010. Fin des études et poursuite des acquisitions foncières. Juillet 2008. L'État, Réseau ferré de France (RFF) et les régions Bretagne et Pays-de-la-Loire signent un protocole de financement commun (34 % minimum pour RFF, 33 % pour l'État et 33 % pour les collectivités bretonnes). 2011. Début du chantier. Juillet 2015. Les premiers rails posés en Bretagne. Printemps 2017. Mise en service prévue.
© Le Télégramme
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