17/12/2010
Impunité ?
Accident mortel à Sarzeau, le gendarme alcoolisé condamné
Télégramme de Brest du 17 décembre 2010
Poursuivi pour homicide involontaire, un gendarme âgé de 33ans et né au Havre (Seine-Maritime), a écopé, hier, devant le tribunal correctionnel de Vannes et après délibéré, d'une peine de deux ans d'emprisonnement avec sursis (Le Télégramme du 26novembre). Les magistrats ont également constaté l'annulation de son permis de conduire, lui interdisant de se présenter à l'examen dans les 18mois à venir.
0,7g d'alcool plusieurs heures après
En outre, le militaire devra verser 1.000€ à l'Association des victimes de la route de Bretagne au titre des dommages et intérêts. Quant au dédommagement de la famille du défunt, un autre gendarme de 24ans, elle sera fixée après l'audience sur intérêts civils, dont la date est fixée à la fin du mois de juin. Rappelons que le condamné avait perdu le contrôle de sa Porsche à Sarzeau, une nuit de juillet2009, sur une route de campagne. Son passager était mort. Le conducteur, grièvement blessé dans l'affaire, avait bu une dizaine de verres d'alcool dans la soirée. Avant le drame, le trentenaire s'était fait contrôler par des collègues. Mais ce contrôle n'avait pas donné lieu à un dépistage d'alcoolémie. Un autre fut néanmoins réalisé plusieurs heures après l'accident: le taux du chauffeur était encore de 0,7g/l de sang. L'expertise avait aussi relevé qu'il roulait à une vitesse comprise entre 110 et 127km/h.
04/10/2010
L'alcool au volant, un témoignage !
Justice, «On ne se sent pas respectés»
Télégramme de Brest du 4 octobre 2010
C'est une personnalité attachante qui a pris sa retraite la semaine dernière. Présidente du tribunal de Lorient depuis 2004, Agnès Lazès nous a accordé unentretien avant deposer définitivement sa robe.
Pour votre ultime audience de rentrée, vous avez décrit un climat morose. 20% de personnel en moins, baisse de 30% du budget...
Oui, le tribunal a particulièrement donné cette année. C'est la juridiction qui a eu la plus grande baisse. Il va nous falloir une rallonge sinon nous serons en cessation de paiement. Ou alors il faudra payer sur le budget de l'année suivante. J'en suis à espérer que le froid ne vienne pas trop tôt pour économiser le chauffage. On a réduit nos abonnements presse, nous n'arrivons même plus à acheter des crayons. Lesdéparts à la retraite ne sont pasremplacés, c'est catastrophique.
Dans quel secteur cela pose-t-il déjà problème?
Aux affaires familiales et au greffe. Et aucun espoir d'amélioration. Cela veut dire des affaires évoquées plus tard. Sans greffier, c'est un peu comme un chirurgien qui veut opérer mais ne trouve pas d'anesthésiste.
Dans le même temps, d'importants travaux débutent.
Notamment l'accueil du pôle de l'instruction après le départ du tribunal d'instance. J'ai reçu l'argent le jour où a été annoncée la possible suppression des juges d'instruction. Il vaut mieux en rire. Derrière le tribunal, la Chancellerie a pour projet de construire un bâtiment pour rapatrier le tribunal d'instance et le conseil des prud'hommes, dans cinq àdix ans. Nous aurons de très beaux bureaux dans lequel nous nous gèlerons.
D'ici là, d'autres réformes...
Il y en a chaque semaine. J'ai vu trois évolutions dans ma carrière: la gestion du temps et l'inflation législative avec des textes ni fait ni à faire que nous n'arrivons pas à suivre. Parfois nousn'avons même pas le temps d'en lire un qu'un autre le supplante.Le chirurgien, c'est comme si on lui apprenait tous les jours unenouvelle manière d'opérer.
Et le dernier changement?
Le mépris dans lequel nous nous sentons tenus de la part de ceux qui devraient nous protéger. Onne se sent pas respectés. Jene parle pas du public qui emboîte le pas. Pourquoi un élève respecterait son professeur s'il entend ses parents le prendre pour un imbécile? Je crois toujours en la Justice mais je ne sais pas si je crois encore en la magistrature. Nous sommes critiquables, bien sûr. Trop longs? Il y a autant de magistrats qu'à la fin du XIXesiècle avec 30millions d'habitants en plus et des contentieux supplémentaires.
La réforme de la carte judiciaire vous a marquée ?
Surtout la façon dont elle a été menée. Quand vous voyez qu'on rouvre Fougères ou Vitré, lesgens ne comprennent plus rien. On me l'a reprochée mais j'ai défendu plus fortement le tribunal d'instance de Pontivy que celui d'Auray car je pensais que ce secteur avait un accès à la Justice plus difficile. Le niveau financier y est moins élevé. Maintenant, certains ne viennent même pas aux audiences. Des discussions sont en cours pour un point d'accès à la Justice sur Pontivy. Je ne voudrais pas que des querelles de voisinage se terminent à coup de carabine plutôt que devant un tribunal.
Et l'alcool au volant?
Je reste désarmé par ce phénomène. Je n'ai pas vu la moindre évolution. J'ai longtemps espéré avec la réforme de la fin du permis blanc et le passage de douze à six points pour les jeunes conducteurs. Mais cela n'a rien changé, c'est désespérant.
Propos recueillis par Yves Madec