Droit à l'oubli ? quelles sont les "données personnelles" ?
27/03/2016
L'Administration fiscale bénéficie d'un statut "asymétrique" en France !
Les affaires entre CNIL et GOOGLE mettent sous le projecteur la question des données personnelles...
et l'aide, qu'elle peuvent apporter à notre vénérable administration fiscale, qui n'hésite pas à "collationner" ces données, pour distinguer votre passage de résidence principale à résidence secondaire... dans ce domaine les incidences sont particulièrement "juteuses" en matière de plus-value immobilière...
Les "traces informatiques", que notre activité entasse volontairement au gré des balades sur le Net, dans les SMS et mails envoyés, dans les achats à distance génèrent des revenus importants, pour ceux qui les vendent ! Leur apparition par exemple dans les affichages d'Amazon ou dans les publicités latérales de certains sites reflètent la qualité de la "traque" et la justesse de leur élaboration.
Avec le fisc, les "rappels" et autres délices de la torture fiscale sont de mieux en mieux calibrés, depuis que l'Administration élabore vos déclarations "pré-remplies". Le croisement des informations est beaucoup plus facile et surtout très rapide, depuis la mise en place des échanges obligatoires de déclaration...
La CNIL préfère aujourd'hui "attaquer" plutôt Google, que l'Administration fiscale !
La "dénonciation" est en ce moment le vrai déclencheur de vos contrôles fiscaux !
Qu’est-ce que l’administration fiscale sait vraiment sur vous ?
Le Figaro du 26 mars 2016
Frédéric Durand-Bazin
Vous vous en doutiez un peu, mais oui : l’administration fiscale sait beaucoup de choses sur vous ! Elle glane, ici et là, de nombreux renseignements qui viennent nourrir les multiples fichiers dont elle dispose. Le fichier central des contrats d’assurance-vie et de capitalisation (Ficovie), dernier document en date, vient ainsi enrichir une panoplie déjà bien fournie. Ce fichier, entré en vigueur au 1er janvier 2016, va être alimenté par les assureurs, qui devront, chaque année, déclarer au fisc les contrats d’assurance-vie et de capitalisation qu’ils détiennent dans leurs comptes. En indiquant, notamment, la valeur de rachat, la date d’ouverture et, surtout, le nom du souscripteur de chaque contrat et celui des bénéficiaires.
1 Quels sont les renseignements transmis automatiquement au fisc ?
Les fichiers du fisc sont alimentés régulièrement par des déclarations spontanées effectuées par des tiers. Ainsi, votre employeur et Pôle emploi lui communiquent les montants qu’ils vous ont versés, et vos établissements financiers lui transmettent l’ensemble des opérations que vous avez réalisées ou dont vous êtes bénéficiaire (revenus des livrets bancaires, dividendes sur titres, cessions d’actions, opérations réalisées sur votre PEA, retraits sur votre assurance-vie ou votre épargne retraite...). De même, le fisc est renseigné par les organismes de Sécurité sociale, les caisses d’allocation familiales, les caisses de retraite, vos assureurs, le service chèque emploi-service...
Le fisc nourrit ensuite ses bases de données avec les renseignements que vous lui transmettez par le biais de vos déclarations de revenus, d’ISF, de plus-values sur titres non cotés, de détention de comptes bancaires à l’étranger, de ventes d’œuvres d’art ou de métaux précieux… Il intègre aussi les informations provenant d’opérations patrimoniales donnant lieu à un enregistrement à la recette des impôts, comme les achats et ventes de biens immobiliers, les donations reçues ou consenties, les successions… Enfin, l’administration fiscale récupère, au cas par cas, des informations en cas de suspicion de fraude ou de litige. Les cellules fiscales implantées dans les palais de justice recueillent ainsi des données sur le partage des biens lors de divorces compliqués, d’abus de biens sociaux, de faillites frauduleuses, de successions houleuses…
2 Le fisc peut-il obtenir des documents auprès de tiers ?
Le fisc dispose d’une arme redoutable : le droit de communication. Il lui permet d’obtenir des renseignements et documents auprès des commerçants, des artisans, des tribunaux, des organismes de Sécurité sociale, des administrations publiques, des banques, des assureurs, des professionnels de l’immobilier, des fournisseurs d’accès Internet… Toutes ces personnes sont tenues de répondre aux demandes des services fiscaux sous peine d’amende. Par exemple, en cas de doute sur la réalité d’une expatriation, l’administration fiscale peut s’adresser à votre employeur pour lui demander le nombre de jours pendant lesquels vous avez travaillé à l’étranger. Elle peut aussi consulter la liste de vos voyages auprès des compagnies aériennes ou ferroviaires, ou exiger des gestionnaires d’autoroutes les dates et horaires de vos bornages au télépéage. Quant aux services d’achat en ligne, ils doivent conserver, durant un an, les données relatives à leurs clients pour qu’elles puissent être transmises au fisc. Les opérateurs téléphoniques sont également soumis à cette obligation. L’administration peut, notamment, leur demander l’historique détaillé et la localisation des appels de leurs clients pour vérifier d’où le contribuable a téléphoné aux dates incriminées, s’il était en France ou à l’étranger. De même, pour déterminer si le logement que vous déclarez comme résidence principale l’est réellement, le fisc peut établir la réalité des faits par l’examen de vos factures annuelles d’électricité, de téléphone et de gaz.
3 Disposez-vous d’un droit de regard sur ces fichiers ?
Les informations collectées sur vous et votre patrimoine par le fisc aboutissent à la création d’un fichier. Il est protégé par la loi Informatique et Libertés du 6 janvier 1978, car il intègre des données à caractère personnel permettant de vous identifier (nom, adresse, mail…). Le fisc doit donc déclarer ses fichiers à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil ), en garantir la sécurité, ne pas les partager avec des sociétés privées… Vous pouvez utiliser votre droit d’accès et de rectification pour les informations qui vous concernent. Pour cela, vous devez écrire à votre centre des impôts pour lui demander de vous communiquer vos données personnelles.
Google condamné à 100 000 euros d'amende par la Cnil
Clubic du 25 mars 2016
Malgré les dernières propositions de Google en matière de droit à l'oubli, la Cnil, l'Autorité française de contrôle en matière de protection des données personnelles, a décidé de mettre à l'amende le géant de l'Internet, à hauteur de 100 000 euros. La cause de cette sanction : la firme de Mountain View n'a pas accédé complètement aux demandes de l'autorité. Depuis la décision de la Cour de justice de l'Union européenne au printemps 2014, les moteurs de recherche en Europe se sont vu contraints de publier un formulaire de droit à l'oubli. Celui-ci permet à un individu, ou une entreprise, de gérer sa réputation sur Internet en demandant au moteur de retirer des liens pointant vers certaines pages désuètes, ou affectant son image ou sa vie privée. Après plusieurs discussions, Google a ouvert ce formulaire. Mais un lien masqué sur google.fr, google.de ou google.es apparaissait toujours sur google.com. David Drummond, responsable des affaires légales chez Google, affirmait alors : « Nous avons eu une approche basique et nous l'avons suivie. A ce sujet, nous avons procédé à des retraits sur l'Europe mais pas au-delà ». Une position que Google ne tint pas longtemps.
Car le G29, le groupe de travail consultatif européen passant au crible les questions relatives à la vie privée, estimait à juste titre qu'il était trop facile de passer sur une édition internationale du moteur de recherche pour obtenir un accès aux pages en question. Google décida donc, pour contenter le G29, de rendre invisibles les pages incriminées sur son moteur au global... pour le pays dont émanait la requête. C'est encore ainsi que Google fonctionne, se fiant donc simplement à l'adresse IP pour déterminer si oui ou non il affiche un résultat. Bien entendu, ce dispositif peut être contourné via un VPN. Et c'est ce qui a poussé la Cnil a condamné Google. « La solution consistant à faire varier le respect des droits des personnes en fonction de l'origine géographique de ceux qui consultent le (site concerné) ne permet pas aux personnes de bénéficier du plein effet de leur droit au déréférencement », a expliqué la Cnil, qui attend donc de Google encore des efforts.
Droit à l'oubli, pourquoi Google a été condamné à verser 100.000 euros
Les Echos du 24 mars 2016
Google est empêtré dans une affaire de droit à l'oubli avec le gendarme français de la liberté des internautes depuis 2015. - Virginia Mayo/AP/SIPA
La Cnil reproche au géant américain un respect partiel du droit à l'oubli.
Une toute petite épine dans le pied de Google. C'est ce que vient de faire la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), qui a annoncé jeudi avoir condamné Google à 100.000 euros d'amende. La raison ? Le gendarme des libertés des internautes français lui reproche de n'avoir appliqué que partiellement le "droit à l'oubli", en n'acceptant de supprimer de ses résultats de recherches (ou déréférencer) des informations concernant des particuliers que sur ses versions européennes. Pour la Cnil, Google devait supprimer les résultats sur l'ensemble de ses versions, au niveau mondial.
Cette affaire découle directement d'une décision de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) qui a consacré le "droit à l'oubli" numérique en mai 2014, en donnant aux citoyens --sous certaines conditions-- la possibilité d'obtenir des moteurs de recherche le déréférencement d'informations les concernant directement. Il s'agit de supprimer des liens contestés de la liste des résultats affichés après une recherche portant sur le nom d'une personne, sachant que les sites incriminés seront toujours accessibles en cherchant avec d'autres mots-clefs.
Google a mis en place un formulaire...
Bien que contestant la décision de la CJUE, Google a mis un formulaire à la disposition de tout internaute désirant qu'une information à son sujet n'apparaisse plus dans le moteur de recherche lorsque son nom est saisi. "Il faut qu'il y ait un motif légitime", a rappelé à l'Agence France Presse (AFP) le secrétaire général de la Cnil, Edouard Geffray, notant que seule la personne concernée peut demander ce déréférencement. Et cela ne doit pas entraver le droit à l'information du public.
Google dit avoir reçu en France plus de 86.600 demandes, concernant quelque 258.300 pages web. Il a déréférencé 52% d'entre elles. Au niveau mondial, Google avait reçu 386.038 demandes entre le jugement de la cour européenne et le 11 février dernier. La France est le pays qui lui fait le plus de requêtes.
... mais ne fait disparaître les résultats qu'en Europe
En cas de refus de Google, le citoyen peut s'adresser à un juge ou, le plus souvent, à la Cnil. Celle-ci a reçu 700 plaintes à ce jour, dont 45% ont été jugées légitimes, et transmises au groupe américain. Mais si Google a finalement accepté d'appliquer ce principe du "droit à l'oubli", il n'a fait disparaître les résultats que pour les recherches effectuées à partir des extensions européennes de son site. Comme google.fr en France ou google.it pour l'Italie, mais pas google.com, l'adresse principale du moteur, ni ses déclinaisons hors d'Europe.
"La solution consistant à faire varier le respect des droits des personnes en fonction de l'origine géographique de ceux qui consultent le (site concerné) ne permet pas aux personnes de bénéficier du plein effet de leur droit au déréférencement", a tonné la Cnil.
Google conteste l'autorité de la Cnil
D'où une mise en demeure, lancée en juin par la présidente de la Cnil Isabelle Falque-Pierrotin, de procéder aux déréférencements sur toutes les déclinaisons du moteur de recherche. "Nous respectons la position de la Cnil, mais nous contestons par principe l'idée qu'une agence nationale de protection des données personnelles revendique une autorité à l'échelle mondiale pour contrôler les informations auxquelles ont accès les internautes à travers le monde", avait répondu Google en juillet.
"Nous pensons qu'aucun pays ne devrait avoir l'autorité de décider à quel contenu peut accéder quelqu'un, dans un autre pays", avait insisté le groupe. La Cnil a en conséquence engagé une procédure de sanction.
Le déréferencement ne nuit pas à la liberté d'expression, rétorque la Cnil
Et, dernière péripétie, Google a proposé en janvier de mettre en place un filtrage géographiquedépendant de l'adresse IP de l'internaute, en plus du référencement sur les extensions européennes de son moteur de recherche. "On parle d'un droit fondamental: vous avez le droit de ne pas figurer dans une base de données", argumente Edouard Geffray. "Jamais, jamais il n'a été question de faire varier l'étendue de ce droit fondamental en fonction du chemin d'accès, ou en fonction du destinataire."
"Contrairement à ce qu'affirme Google, le déréférencement sur toutes les extensions ne limite pas la liberté d'expression dans la mesure où il n'entraîne aucune suppression de contenu sur internet", a relevé la Cnil jeudi. Google risquait une sanction pécuniaire de 150.000 euros --beaucoup moins que les 20 millions ou 4% du chiffre d'affaires prévus dans le projet de loi République numérique et un futur règlement européen, qui sont actuellement en discussion.
Google pourrait saisir le Conseil d'Etat
Le groupe américain doit désormais se mettre en conformité avec cette décision, qu'il peut toutefois contester devant le Conseil d'Etat.
Google avait été condamné pour la première fois par la justice française en décembre 2014 pour avoir refusé la demande de droit à l'oubli numérique d'une femme condamnée pour escroquerie en 2006, et qui estimait que le référencement par le moteur de recherche de sa condamnation sur internet pourrait l'empêcher de trouver un emploi.
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