La dématérialisation du bac ?
18/06/2014
4 millions de copies, 170 000 examinateurs...
L'Education Nationale vit au rythme de ses enseignants et de leur formation, qui remonte souvent entre 20 à 40 ans ! C'est dire que la pratique informatique, non enseignée, est chez eux rudimentaire...
Le seul perfectionnement introduit récemment dans les épreuves du bac est le "scan" des copies avec redistribution à domicile pour les correcteurs ! Ce qui peut éviter les pertes ou le vol... au détriment des élèves !
On est donc encore très loin de la tablette, qui pourrait remplacer la "copie" traditionnelle, de l'utilisation de l'internet pour envoyer les sujets, de la correction assistée en ordinateur chez le correcteur. Seule, la transmission des notes en informatique est en voie de généralisation !
La "dématérialisation dans l'éducation", un vrai sujet d'un futur baccalauréat !
Le bac avec webcam et tablette n'est pas pour demain
Le Monde du 16 juin 2014
Mattea Battaglia et Angèle Guicharnaud
Lundi 15 juin 2020. Johanna, 18 ans, ne craint absolument pas qu'une grève perturbe le premier jour du baccalauréat. C'est devant l'écran de son ordinateur connecté à Internet, manuels et cours à sa disposition, que la jeune fille commence l'examen. Elle a déjà validé les deux tiers des matières en cours de formation. Il lui reste quelques oraux à passer, mais là aussi sans se déplacer : c'est via sa webcam qu'elle sera interrogée par le jury, à l'autre bout du pays.
Science-fiction ?
Sans doute. Alors que les épreuves écrites du baccalauréat commencent lundi 16 juin pour les 687 000 candidats de l'édition 2014, toucher à cet examen reste un geste politique périlleux. Il y a bientôt dix ans, la seule évocation par François Fillon de l'introduction d'une dose de contrôle continu avait précipité dans la rue des milliers de lycéens. En 2010, Luc Chatel a réussi la prouesse de réformer le lycée… sans toucher au bac. Depuis l'avènement de la gauche, le sujet est laissé en suspens. Et pour cause : comme le veut le slogan, la « priorité » va « au primaire », et pas à ce qui se joue après la fin de la scolarité obligatoire, soit 16 ans.
Pourtant, le baccalauréat opère une lente mue au fil des ans. Présentée comme l'une des nouveautés de 2014, l'organisation d'épreuves à distance – par visioconférence – a été introduite pour des candidats « au profil très spécifique », souligne-t-on au ministère de l'éducation. Des jeunes qui ne peuvent se déplacer en raison de leur isolement géographique, d'un handicap, d'un problème de santé ou parce qu'ils sont incarcérés.
« DÉMATÉRIALISATION »
Le procédé aura permis, fin mai, à un lycéen de Saint-Dié (Vosges) de s'épargner un aller-retour à Reims pour passer un oral de néerlandais. Ou à un jeune Polynésien scolarisé à Mérignac d'échanger avec un examinateur à 16 000 kilomètres de distance – à Papeete ! – faute d'enseignants de tahitien en Gironde. Au total, seule une dizaine de candidats en auront bénéficié. « Cela ne préfigure pas d'une généralisation dans les années à venir, reconnaît-on au ministère, même si plusieurs centaines de candidats pourraient être concernés à l'horizon 2020-2030. »
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Taper sa dissertation de philosophie sur une tablette, ce n'est pas non plus pour demain.
La « dématérialisation » des copies du bac, introduite en 2011, ne concerne en tout et pour tout que 12 000 des 29 000 élèves de 1ère et de terminale scolarisés dans des établissements de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE). L'AEFE prévoit que 100 % des copies bénéficient de ce mode de traitement dans un à deux ans.
Mais pour les lycéens, le changement est symbolique : il se résume à écrire à l'encre noire – la seule qui permette de scanner les copies. « Scannées, les copies venant de tous les centres d'examen dans le monde sont transférées via un système crypté vers un serveur sécurisé, explique-t-on à l'AEFE. Les correcteurs, où qu'ils se trouvent, peuvent dès lors travailler en ligne sur les copies grâce à un système de “calque” modifiable. »
La seule à avoir poussé plus loin l'expérience de la dématérialisation est une école de commerce. Ses étudiants passeront en juillet leur examen de fin d'année devant leur propre ordinateur. « Quand l'épreuve commence, une page blanche avec le sujet s'affiche en plein écran, l'étudiant n'a plus qu'à taper ses réponses sur son clavier », explique Clément Régnier, de la start-up TestWe, qui assurera le bon déroulement de la dizaine d'épreuves. Pour l'heure, ce dispositif semble compliqué à mettre en place à l'échelle du baccalauréat – 4 millions de copies, 170 000 examinateurs.
PLASTICITÉ
Pour autant, « le baccalauréat n'est pas un monument historique irréformable », souligne l'historien Claude Lelièvre : « Il a fait la preuve, en deux siècles, de sa plasticité, au point que celui que nous connaissons aujourd'hui n'a pratiquement plus rien à voir avec celui créé par Napoléon en 1808. » Un baccalauréat 2.0, ce spécialiste du système éducatif ne l'exclut pas, et à une échéance pas si éloignée. « Dans dix ans, le numérique pourrait avoir changé la forme du bac mais aussi la nature des épreuves, prédit-il. On sortirait de la restitution brute des connaissances. »
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En 2010, le Danemark a été le premier pays à autoriser l'accès à Internet lors de certains examens. La France en sera-t-elle capable ? L'optimisme n'est pas partagé par tous. « La conception même des épreuves du baccalauréat s'oppose aux évolutions technologiques », regrette Philippe Tournier, du syndicat Snpden-UNSA, majoritaire parmi les proviseurs.
« On voit arriver des changements un peu folkloriques, qui visent en premier lieu à réduire les charges financières. » Le risque de l'inertie existe, selon lui : « Il y a vingt ans, on se demandait déjà comment réduire le poids du baccalauréat. On peut imaginer que dans vingt ans, on ait un nombre d'épreuves encore plus important, encore plus coûteux. » D'où l'importance de se poser la « bonne » question : non pas à quoi doit ressembler le baccalauréat, mais à quoi doit-il servir ?
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