La santé, le manque d'argent et l'absence de compagnon de voyage...

Seniors, voyageurs en quête de bien-être
Télégramme du 1er mars 2013

Les seniors représentent pour les tour- opérateurs une clientèle énorme. Pourtant, peu d'études marketing ont été menées sur le sujet. Lacune comblée en partie par Gaëlle Ulvoas, enseignante- chercheuse du campus brestois de France Business School (*).

Les voyageurs de 65 ans et plus ont du temps et un pouvoir d'achat de plus en plus fort. Les foyers touchant deux retraites étant de plus en plus nombreux. Résultat : les seniors n'ont jamais autant voyagé. En 2011, plus d'un sur deux a investi dans un voyage. Et un sur cinq s'est rendu à l'étranger. L'an dernier, les seniors ont dépensé 33 % de plus qu'en 2006 dans ce secteur d'activité !

650 personnes interrogées
Paradoxalement, le comportement de consommation des voyageurs âgés est très mal connu. « J'ai voulu en savoir plus sur les motivations de cette clientèle, explique Gaëlle Ulvoas, enseignante-chercheuse à la FBS, qui vient de soutenir sa thèse. Pour ce faire, j'ai interrogé 650 personnes. Dans leur grande majorité des Bretons. Les questions portaient sur le poids de la spiritualité dans les choix des destinations et des produits proposés. Cette spiritualité n'est pas cantonnée au religieux. Elle englobe tout ce qui peut donner du sens à la vie : comme l'engagement associatif, l'envie de découvrir d'autres civilisations, le partage, le retour à ses racines, etc. ».

Finis les voyages de masse
Selon Gaëlle Ulvoas, ce degré de spiritualité - élément qui n'est que très peu pris en compte par les voyagistes - serait très élevé chez les plus âgés. L'échéance de la fin de vie étant très présente à l'esprit. « Les voyages en groupe, en autocar, au pas de course, c'est fini. Les nouveaux retraités ne veulent plus de ça. Ils recherchent un apport culturel bien plus marqué et davantage de contacts avec les populations ». Les motivations sont donc bien plus profondes que le simple fait de changer d'air et de se détendre. « Surtout à cette période de la vie où la notion de sens est impérieuse. Je pense que la plupart des offres qui sont faites ne sont pas assez ciblées sur le plan du contenu ». Même chose en ce qui concerne l'organisation à proprement dite des voyages.

Trois freins recensés
Quand on est senior, il y trois freins principaux aux voyages : « La santé, le manque d'argent et, surtout, l'absence de compagnon de voyage. Ceux qui partent seuls peuvent craindre la solitude. Mais ils doivent surtout payer un supplément. Je pense qu'on peut mettre des choses en place pour amener des veufs et des divorcés à se rencontrer et à découvrir le monde ensemble ». Cette étude marketing va à rebrousse-poil de ce qui est habituellement fait car elle prend en compte l'aspect humaniste que peut avoir une démarche mercantile. « Je pense que le marketing peut jouer un rôle dans la création de bien-être », poursuit Gaëlle Ulvoas. « Et contribuer au vieillissement réussi. Plus on avance dans le temps et moins la vieillesse est ressentie comme une déchéance. Mais comme une continuité de croissance ».

* Ce travail de recherche a été mené principalement auprès de la clientèle de Salaün Holidays, à Pont-de-Buis (29).
• Didier Déniel